Dans cet article, nous allons explorer brièvement ce que veut dire «mental». Ce mot signifie «dire», «s’exprimer», «donner du sens».
Dès cet instant-là, un sportif qui souhaite développer son « mental » devrait sans doute s’interroger sur ce qu’il exprime lors de sa pratique. La compétition, soumettant à un stress souvent important est un très bon révélateur de notre langage sportif. Pratiquer un sport, c’est un peu comme s’exprimer verbalement. Parler du sport, des sportifs, de soi, des autres etc… Si ça ne voulait rien dire, personne ne ferait de sport. C’est bien trop d’efforts pour ne se contenter de « rien »… Et recommencer ce « rien » à chaque compétition en s’infligeant au passage tous les entraînements tous plus éreintants les uns que les autres. Arrêtons-là le langage « psy » !
Il y a plusieurs formes de communication au travers de la pratique sportive. Celle avec soi-même, et celle avec les autres. Commençons par aborder la seconde.
1. La communication « extérieure » :
Il s’agit des relations avec l’entourage : parents, famille, amis, enseignant(s), coach(s)… Bien entendu, toutes ces relations, chacune à leur façon, vont jouer un rôle plus ou moins grand selon l’importance que leur accorde le sportif. Pour certains, le coach est un élément central ; c’est souvent ce que les compétiteurs de haut niveau attendent d’un coach. Cependant, ce n’est pas une règle générale. Pour prendre des exemples dans le monde du tennis : Nadal, c’est son oncle qui joue ce rôle, bien qu’il joue le rôle d’entraîneur il n’en reste pas moins un membre de la famille. Un joueur comme Federer se passe régulièrement de coach et mise son équilibre sur sa famille et amis proches. Dans le cadre d’un sport d’équipe, c’est un peu différent, car le groupe constitue un élément supplémentaire. On pourrait presque dire un sportif de plus. Il peut alors y avoir des relations avec le coach qui a pour fonction de maintenir la cohésion et donc l’expression du groupe, mais chacun des membres a également sa propre relation avec les autres membres, avec son propre entourage puis celui du groupe. C’est pourquoi, pour y comprendre quelque chose, il est mieux de partir du point de vue individuel puis d’étendre progressivement. Tout comme on part du point de vue de l’entraînement pour aller vers le rapport à la compétition.
Il s’agit de comprendre que la communication recouvre un grand nombre de choses et qu’il convient de lui accorder une place importante dès l’instant où l’on aborde l’aspect mental du sport. Je ne parle pas de faire une psychanalyse pendant 15 ans mais juste de permettre au sportif de bien savoir où il met les pieds ; quelles sont les incidences de ses comportements ou attitudes ? Ceci dans un but précis, savoir où se place chaque membre de son entourage par rapport à sa pratique sportive. Bien que cela semble réservé aux plus hauts niveaux, mon expérience m’a conduit à le ramener au sport amateur.
Combien d’enseignants ont des difficultés à gérer les parents des jeunes sportifs ? Pour rester sur l’exemple des jeunes, ils veulent faire plaisir à tout le monde, s’il n’y a pas de cohérence dans l’entourage, le niveau sportif exprimé descend en flèche. Les conflits entre les membres de l’entourage resurgissent sur l’expression sportive. Ce n’est déjà pas facile à gérer pour un sportif adulte, alors mettons à la place d’un enfant ou un ado compétiteur…
Pour favoriser le sportif à s’exprimer à son meilleur niveau, il est essentiel que la communication soit bonne. C’est le défi majeur du sportif de haut niveau : faire tenir tout le monde ensemble, trouver le meilleur équilibre. C’est d’ailleurs pour cela que nombre de sportif de très haut niveau préfèrent parfois la solitude… quitte à perdre d’autres avantages apportés eux par les autres. Mais, j’insiste là-dessus : ceci est valable pour n’importe quel niveau, pro ou non. Pour les pros, il est vrai que c’est leur carrière c’est à dire une partie de leur vie qui se joue, pour le sportif occasionnel c’est selon l’importance accordée.
Concrètement, il faut que chacun reste à sa place. L’enseignant reste l’enseignant, il peut être un ami mais sa position dans l’esprit du sportif doit être la référence sur le plan de l’enseignement, technique, tactique, physique etc… Le coach, c’est le sportif qui décide la place qu’il devra assumer ou le coach lui-même qui propose quitte à essuyer le refus du sportif. Les parents, même s’ils connaissent bien le sport doivent rester la famille, apporter du soutien ok, accompagner ok, mais jamais s’exprimer sur le discours des autres membres. Les amis, même rôle. Ensuite, c’est à chacun de garder sa place et de se rappeler que c’est le sportif le centre et non la personnalité de chacun. On retrouve la notion d’ « équipe » vu en début d’article. On est toujours en équipe… Même un sport individuel est un sport d’équipe… S’il ne l’est pas, de mon point de vue, il est voué à l’échec.
RESUME :
Pour une expression sportive maximum : le sportif doit être le centre de l’attention. Ce qui permet à quelqu’un de donner le maximum de ses capacités, c’est lorsqu’il est stable émotionnellement, qu’il est entouré de gens qui ont confiance en lui, qui le soutiennent.
Je n’accorde pas de place privilégiée à aucun des acteurs. Je crois que le sportif accorde une importance à chacun qui peut varier en fonction de son expérience, de ses compétitions, de sa vie. De la même façon qu’au fil du temps nous ne fréquentons pas les mêmes personnes. Nous faisons de nouvelles rencontres, découvrons de nouveaux horizons.
2. La communication « intérieure » :
A présent, intéressons-nous à la communication, au langage envers nous-même. Ici, je vous passe les travaux multiples sur l’image de soi, l’estime de soi etc… Revenons sur un des propos ci-dessus : « le sportif doit être le centre de l’attention ».
Je souhaite préciser ce que j’entends par « centre ». En effet, il ne s’agit aucunement de faire du sportif une sorte de super-ego ou de centre du monde. Ce que je vise dans mes dires, c’est montrer que l’attention du sportif doit être sur ce qui se passe en lui afin de prendre conscience des fonctionnements qui le conditionnent. Pour revenir sur l’entourage, il a une grande fonction pour en quelque sorte absorber une partie des difficultés auxquelles un sportif est obligatoirement soumis. Tous les stress liés à la compétition, le rapport aux autres, les rivalités, pressions, points importants, enjeux, blessures et j’en passe. L’entourage doit permettre au sportif de rendre les difficultés surmontables, les montrer sous un jour acceptable afin que ces stress puissent être source de motivation et non un obstacle infranchissable ou une phase de stagnation.
L’état d’esprit est donc prépondérant dans cette vision des choses. Je pars ici du principe, que le sportif bénéficie de son entourage pour atténuer la force des difficultés, lui permettant ainsi de se concentrer sur l’essentiel : s’exprimer à son niveau sportif le meilleur.
Naturellement la concentration sur l’essentiel n’est donc pas de considérer que l’entourage est au service du sportif et n’entrera jamais en opposition avec lui. C’est plus complexe que cela. Mais, il s’agit de se concentrer sur ce qu’il peut maîtriser : sa concentration, ses émotions, sa combativité ; c’est-à-dire les qualités nécessaires d’un compétiteur. Là encore, qu’il soit à très haut niveau, ou amateur, l’état d’esprit reste le même. Ce qui varie surtout, c’est la force et l’intensité des difficultés comme de la concentration nécessaire. Il va de soi qu’un sportif de très haut niveau a des exigences bien plus grandes et des conséquences qui ne sauraient être les mêmes qu’un pratiquant amateur. Mais si cela ne convenait que pour les athlètes alors les coaches seraient tous des anciens très grands sportifs, ce qui est assez rare si on regarde bien.
Notons également que la compétition peut s’établir par rapport à soi et suivant comment elle est considérée permettre des progrès considérables ou provoquer un repli négatif.
A présent, j’en viens au dialogue avec soi-même. Le rapport conscient / inconscient. On est là sur le plan pratique. Il faut bien garder en tête, en compétition comme en entraînement ; qu’on soit enseignant, membre de l’entourage ou le sportif-même. Notre inconscient ne retient pas la polarisation que nous mettons à tel ou tel événements mais l’intensité que nous lui consacrons. Je m’explique : on mémorise un élément suite à l’investissement qu’on y consacre. Il peut être un effort de concentration, un ressenti physique très fort (lié à l’adrénaline entre autres), des « sensations fortes », une émotion, un stress etc… On y associe souvent le langage : « allez !!! », « Non, pas ça ! », « Je suis nul », « je suis le plus fort » par exemple. Ces éléments de langage accentuent l’action qui vient de se dérouler… une victoire, une action de jeu positive ou négative, gain d’un point important.
Mais attention ! Ce qui important c’est l’action. Le langage donne de l’importance à l’action. Si commettez une erreur, que vous vous encouragiez ou vous vous accusiez de l’avoir faite : même conséquence. On mémorise l’action qui vient de se dérouler. PEU IMPORTE les mots utilisés. Dans l’action, le sens importe peu. Dans le cas présent, vous augmentez la mémorisation de l’erreur… ce qui n’est pas le résultat escompté. On retient davantage car on a fait monter la charge émotionnelle de manière inadéquate.
Le langage a cependant une autre fonction, celle d’informer. Par exemple, suite à une erreur on analyse avec des mots ce qui vient de se passer pour ne pas recommencer. (On se place ici dans l’analyse pure, pas d’émotion). Regardons une illustration : « j’ai encore mis la balle 10 mètres dehors », chose que l’on entend souvent au bord des courts de tennis… La partie émotionnelle insiste sur le fait de recommencer, mais on ne s’y intéresse pas ici. La partie informative est « 10 mètres ». On retient verbalement 10 mètre. Pour corriger on se base sur une information fausse. La correction aura donc toutes les chances d’être mal effectuée. Une simple phrase comme celle-ci contient donc deux erreurs facilement évitables.
Résumé :
Dans notre langage, il faut garder toujours à l’esprit l’action. C’est elle qui prime. Il s’agit de s’exprimer avec des verbes d’actions en priorité. On évite toute connotation négative, la neutralité est encore la meilleure chose.
Un langage positif a deux versants : l’un qui encourage et maintient dans une bonne dynamique mais un autre qui conduit à avec trop d’extravagance, et peut conduire à l’illusion que s’exprimer positivement suffit et que les efforts ne sont plus nécessaires.
C’est pour cela que, hors cas particulier, je conseille plutôt la neutralité quelle que soit l’action. J’appelle « cas particulier » : un point qui dure très longtemps, « parfait » ou encore un but au foot, une action spectaculaire… Il est mieux de maintenir un état d’esprit le plus calme possible rendant favorables les conditions pour la concentration qui permet de s’exprimer pleinement.