• Préparations mentales et états d´esprit

    1. Préparations mentales et intentions

    En prenant connaissance des récents propos de Pierre-Ambroise Bosse et de Kévin Mayer ou encore Christophe Lemaitre dans divers médias, je n’ai pu m’empêcher d’écrire un article de réflexion sur les préparations mentales. En effet, ils illustrent, à mon sens, de parfaits contre-exemples de l’état d’esprit de la plupart des méthodes de préparations mentales mises en avant aujourd’hui par d’habiles ou moins habiles commerciaux.

    Depuis longtemps maintenant, toutes bonnes préparations mentales débutent par une fixation d’objectifs précis. Ceux-ci doivent être accessibles, cohérents, exprimés de manière positive, concrets pour ne pas laisser de place au doute et j’en passe. PAB, lui, arrive perclus de douleurs en tout genre, dans l’incertitude la plus complète, davantage présent pour limiter la casse que pour faire une performance… C’est ainsi qu’il devient champion du monde à la surprise générale, peut-être la sienne au premier rang. Christophe Lemaitre arrive à ces mêmes championnats sans grande prétention, il glane une médaille de bronze. Plus tôt au JO de Sotchi 2014, souvenons-nous de Pierre Vaultier, en délicatesse avec son physique (rupture des ligaments croisés). Deux mois plus tard, il sera médaillé d’Or en snowboard.

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    Nombre de préparations mentales ont pour argument de vouloir débarrasser le sportif de ses doutes, du moins du maximum d’entre eux, oubliant par la même la fonction du doute : exercer notre discernement. Ainsi, voit-on des athlètes adopter des préparations qui ne leur sont pas adaptées sous prétexte que statistiquement on peut dire que c’est efficace. Mais qu’y-a-t-il du plus irrationnel que la performance sportive ?

    Ce qui est vrai un jour peut être faux le lendemain. Les préparations mentales sont ainsi moins l’art d’être fort dans sa tête que d’être capable de rebondir, de s’adapter à toutes les circonstances. Au bout du bout, tous les champions le rapportent… rien ne se passe jamais comme prévu. Il convient d’être souple psychologiquement et lucide.

    Qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit. Je n’avance pas qu’il ne faut pas fixer d’objectif. Evidemment, il faut savoir où on va. Cependant, ce qui permet à un athlète de devenir un champion est sa rapidité à se rendre compte d’une chose importante : ce qui est un outil à un instant donné devient un obstacle à un autre. Combien d’exemples avons-nous de sportifs ou de sportives qui se targuent d’objectifs très ambitieux… Lorsqu’ils ou elles les atteignent, c’est terminé. Le niveau baisse, les performances ne sont plus au rendez-vous car l’objectif a été atteint. On me répondra qu’il suffit de refaire le point et réviser ses objectifs. Cependant, l’expérience montre que cela ne fonctionne qu’avec des objectifs modestes. L’investissement personnel nécessaire pour les plus ambitieux entraîne une perte difficile voire impossible à digérer.

    La joueuse de tennis A Mauresmo avait pour objectif de gagner 1 tournoi chelem et d’être numéro 1 mondiale. Elle a magnifiquement réalisé ceci et nous pouvons la féliciter pour sa magnifique carrière. Mais, replaçons le contexte : on s’aperçoit qu’une fois les 2 objectifs réalisés, son niveau n’a plus été le même. Les matchs ont été plus difficiles. Elle arrêtera sa carrière quelques années plus tard sans avoir véritablement pu retrouver son niveau de jeu véritable… Un hasard ? Au tennis, on le remarque avec nombre de joueurs espagnols (JC Ferrero par exemple) ou argentins (G Gaudio) qui, à l’époque gagnaient Roland-Garros. Une fois le titre en poche, impossible de retrouver leur meilleur niveau. Rares sont les athlètes qui parviennent à réitérer régulièrement des performances. Je vais explorer quelques points importants. J’illustrerai cela avec divers exemples issus notamment des derniers championnats du monde d’athlétisme de Londres.

    2. La passion de la compétition

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    Chaque athlète a le désir de réussir peu importe ses motivations : l’argent, la gloire, les records, satisfaire son entourage, les performances. Les divergences portent sur les moyens d’y parvenir. Quand on parle de sport aujourd’hui, on l’associe quasi exclusivement au sport de compétition. Cependant, les athlètes ne sont pas uniquement des compétiteurs. Il suffit d’élargir notre regard aux arts martiaux : les samouraïs par exemple, les archers ou les karatékas dans le Zen. Sans aller jusque-là, la grande majorité des pratiquants de sports, le font en dehors de toute pratique de compétition. Sont-ils plus ou moins performants que ceux qui s’adonnent à la compétition sous sa forme institutionnelle ? Pas sûr…

    La compétition induit des effets qui peuvent avoir des incidences positives ou négatives. Ils ne sont en réalité ni l’un ni l’autre mais selon ce que le sportif en fera, cela deviendra constructif ou destructeur. Dans un premier temps, le fait qu’il y ait beaucoup d’argent en jeu peut motiver les athlètes à être meilleurs. Cela créera un engouement qui verra des centaines de nouveaux pratiquants se diriger vers ce sport (le foot par exemple). Dans un second temps, devant l’adversité, cela peut soit les encourager à se dépasser et s’entraîner dur, soit parfois à faire appel au dopage ou les deux. La culture personnelle, et celle du pays, contribue aussi beaucoup dans le positionnement de chaque athlète.

    On peut envisager deux façons principales de percevoir la compétition. Première possibilité : le sportif se base sur l’extérieur, soit sur les autres. Ce qui compte, ce sont les performances, les statistiques, les résultats. Sa préparation se constitue autour de ces éléments. On passe d’objectifs en objectifs. Ils sont souvent proposés ou fixés par un staff réduit ou étendu. Chaque acteur peut avoir des objectifs propres qui seront plus ou moins rassemblés par le coach principal.

    Deuxième possibilité : le sportif est son propre centre de référence. Son objectif dans l’absolu est sa propre performance, son surpassement. C’est dans cette configuration que se trouve Pierre-Ambroise Bosse. Dans une interview donnée récemment à LCI, il insiste sur le fait de se rendre compte d’être capable de réaliser telle ou telle chose. Il est rarement question des concurrents qui sont d’ailleurs moins vus comme tels que comme des aides à se surpasser lui-même. La préparation est ainsi très différente. L’intention, l’état d’esprit, qui n’est autre que l’impulsion de l’athlète, change son rapport au sport dans l’absolu.

    A noter que les mêmes techniques peuvent être utilisées dans les deux types de préparations mentales. Seules diffèrent les motivations. Dans le premier cas, ce sont les performances qui dicteront les orientations. Dans le second cas, c’est la subjectivité, les ressentis qui prendront les rênes. Soit on préfère la raison aux émotions et ressentis personnels, soit on suggère que leur expression pleine et entière offre les bases du dépassement de soi. Ainsi, Pierre-Ambroise Bosse affirme « on dit souvent qu’on court avec ses jambes et sa tête, moi je cours avec mon cœur ».

    Là encore, ne restons pas en surface. Je parle ici d’absolu. Rechercher le surpassement de soi dans l’absolu ou l’expression de sa subjectivité ne signifie pas agir de manière irrationnelle ou s’entraîner de manière irraisonnée. Bien au contraire.

     

    3.  Douleur, souffrance, masochisme

     

    Ces trois composantes font partie de la vie de tous les athlètes et a fortiori de tous les champions. Avoir mal ou savoir se faire mal est le lot quotidien d’un sportif. D’un point de vue psychologique, il faut donc savoir y faire avec le masochisme en prenant garde de ne pas tomber dans la spirale des blessures chroniques. La douleur est une part indissociable de l’entraînement sportif.

    Aucune performance, aucun dépassement de soi n’est réellement possible sans une part de douleur. La souffrance doit être perçue comme une voie de la connaissance de soi-même. Le champion est un artiste de l’extrême, il doit savoir pousser son corps au-delà de ce qu’il pense possible sans pour autant oublier que sans lui il n’est plus lui-même. La douleur fait en quelques sortes corps avec le corps de sportif. La souffrance est une expérience du corps permanente. Elle transformera l’athlète en champion s’il est suffisamment lucide. Sinon, elle le détruira à plus ou moins long terme, par la blessure ou l’usure.

    La souffrance a affaire avec l’intimité des athlètes, de l’humain. Le fait d’avoir finalement assez peu de témoignage sur ces moments, même dans les biographies les plus détaillées, n’y est pas étranger. Christophe Lemaitre aborde son passé qui l’a construit et qui explique en partie la force qu’il a dû tirer du sport de compétition pour dépasser ses difficultés d’enfant et d’adolescent. Plus proche des échéances, Kévin Mayer évoque des phases de « déprimes » qui sont d’autant plus intenses que l’enjeu est grand mais sans lesquelles il ne serait pas au top. Elles lui permettent d’accéder à ces états de performance d’exception, à lui de les gérer habilement pour arriver à « laisser passer la foudre » et arriver au sommet le jour J en profitant de son énergie sans être carbonisé par elle.

    Dans un autre ordre d’idée, ce n’est pas pour rien qu’aujourd’hui le coaching par des sportifs aguerris fait son entrée dans les établissements de soins auprès des patients atteints de maladies graves. Ils partagent une expérience commune de la douleur et de la souffrance.

    Pierre-Ambroise Bosse y fait référence dans l’interview déjà citée. Il s’est présenté avec des douleurs un peu partout à ses derniers championnats du monde. Souffrance physique bien sûr, mais également la souffrance psychologique d’arriver à une telle échéance dans de telles conditions n’en renforce pas moins la ou les douleur(s) ressentie(s). Lorsque le journaliste évoque son avenir sportif, Bosse exprime avant tout son besoin de se reposer s’il veut préserver son organisme… autant que son psychisme car l’un ne va jamais sans l’autre.

    L’équilibre repos/intensité est bien difficile à trouver. En effet, les décharges hormonales modifient considérablement les ressentis et les sensations. Pratiquer intensément procure des shoots de substances par le cerveau qui activent fortement les centres du plaisir. Mais comme tout shoot, la descente est souvent plus abrupte que la montée. Cela fait partie des raisons pour lesquelles l’équilibre psychologique des athlètes est souvent précaire contrairement à ce qu’on pourrait penser. Savoir se reposer, savoir apaiser les effets des décharges extrêmes que demande le sport à très haut-niveau relève d’un véritable art. Beaucoup font appel au dopage pour supporter la douleur, ou pour supporter la descente…

    Juste après les championnat, Bosse affirme qu’il ne dort plus depuis plusieurs jours. Cela fait partie du lot, ne pas oublier que ça va redescendre même si après de belles victoires la descente survient plus tard. Cela remonte bien sûr mais souvent bien lentement. Kévin Mayer insiste également sur « une bonne semaine à ne rien faire » pour cause d’épuisement physique et psychologique. La charge émotionnelle anormalement élevée nécessite quelques habilités.

     

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    4.  La puissance de l´entourage

    Pierre-Ambroise Bosse illustre à merveille le travail de l’artiste. Un champion ne peut le devenir seul. Il a besoin de sa famille, de ses amis, de son staff, de son coach… et des autres. En fait, j’avancerai qu’on pourrait dire que c’est cela un champion, tout cela à la fois. L’artiste, la performance et tout son entourage… le public y compris.

    La famille et les amis permettent de se situer dans notre rapport au monde. En général, ce sont eux qui nous permettent de garder la tête sur les épaules. Ils nous rappellent notre histoire, sportifs ou non, d’où nous venons, à défaut de savoir où nous allons. Car, au final, on ne sait jamais de quoi demain sera fait.

    Pierre-Ambroise Bosse, une nouvelle fois, insiste sur le rôle de Pierre Lignier son coach. Il souligne tout particulièrement son importance quant au fait de l’avoir guidé pour qu’il s’intéresse à autre chose que « le contexte de l’athlétisme ». L’entourage est là aussi pour cela : rappeler que le sport est une partie de l’identité du sportif mais certainement pas son identité tout entière. Bosse parle magie, séduction, offrir à boire à des inconnus… le reste est réservé à l’entraînement. L’entourage est ce qui rappelle que le champion est humain au fond. Il est dans l’extrême avec la pratique sportive mais il est comme tout le monde le reste du temps… ou presque. C’est une chose qu’il est souvent bon de rappeler aux jeunes, ne pas oublier de faire autre chose.

    Sri Aurobindo, un éminent yogi du siècle dernier, insistait sur l’importance de savoir créer son propre air spirituel. Il disait cela pour mettre l’accent sur la responsabilité de chacun de devoir s’entourer des personnes qui permettront de progresser et s’éloigner des autres. Cela fait partie intégrante là-encore du travail de l’artiste. L’entourage est aussi souvent celui qui remet à sa place en rappelant les origines du sportif, celui qu’il est avant d’être sportif ou pour le dire à la Pierre-Ambroise : « Ne pas se prendre au sérieux » ; formule qui semble prendre valeur de mantra personnel pour lui.

    Je termine ce paragraphe sur l’importance de l’entourage pour le champion par ces mots de ce même champion qui font prendre une dimension aux efforts d’années entières de sacrifices : « voir dans le regard que ton pote est plus content que toi ».

     

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    5.  Savoir profiter de la vie

    Cette dimension est indispensable pour pouvoir supporter les charges d’entraînement autant que les charges émotionnelles. Le yoga au travers du concept de « rasa » (saveur) affirme régulièrement, non sans provocation, que c’est moins l’alimentation qui nourrit l’individu que sa capacité à savourer l’existence. En général, suite à une victoire, les champions n’oublient pas de « profiter de cette plénitude » comme le rappelle Kévin Mayer. Pierre-Ambroise Bosse compte profiter de cette période qui alimentera le puissant moteur de sa motivation pour la suite de sa carrière. De plus, l’intensité de toutes ses sensations hors norme laissera de profondes empreintes auxquelles le champion pourra faire appel pour ses compétitions futures mais également dans sa vie. Les émotions peuvent être provoquées par des situations exceptionnelles mais elles n’en restent pas moins universelles et révélatrices de l’humanité de chaque sportif/humain.

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    Savourer l’existence est ce qui permet de contrecarrer les aspects destructeurs de la souffrance et de la douleur vues plus haut. Une carrière sans saveur serait sans doute impossible à mener tant les efforts nécessaires, les sacrifices sont nombreux. Afin d’y parvenir, c’est la référence aux sensations que l’on retrouve chez tous les champions. Beaucoup parlent des émotions extraordinaires qui les traversent. Cependant, les émotions sont les conséquences de sensations exceptionnelles. Le champion en prend d’autant plus conscience, les savoure d’autant plus, qu’il se trouve dans des états mentaux propices à cela. Ces états sont provoqués par les nombreuses substances sécrétées par le cerveau lors d’une activité physique intense mêlées à la puissance de la concentration de l’athlète. C’est sous certains aspects, ce que d’aucun appelle vivre l’instant présent, l’état de pleine conscience ou plus généralement un état méditatif.

    La compétition sportive devient aisément le lieu de l’expérience de la vie, des émotions et des sensations. Un lieu de connaissance, un lieu de partage, une scène de concrétisation du travail effectué à l’entraînement.

    Savoir apprécier n’est pas forcément inné. Bien que cela le soit assez souvent chez les enfants, c’est une autre affaire dès que les contraintes de la vie active se présentent. La dimension de la douleur chez les sportifs renforce cette difficulté et provoque une forme d’aigreur. Cependant, il ne s’agit que d’une habitude. Souvent, la réactivation plusieurs fois par jour de souvenirs, le fait de « revisiter » des instants comme ceux où l’on est subjugué par la beauté d’un coucher de soleil, saisit par le sourire de ce « pote qui est plus content que soi-même », les instants de fluidité suffisent à quitter la voie de l’amertume pour renouer avec la voie de la saveur… Tout un programme en soi !

    6.  Perspectives

    Savourer l’existence, refuser de se laisser abattre par les difficultés en exprimant son identité par-delà l’adversité des compétitions ou de la vie préserve également de nombreux travers. Je ne pouvais clore cet article sans faire référence au fléau du dopage. Récemment, j’ai lu que l’Inde était un pays dans lequel cette pratique est tellement répandue que l’on ne voit presque pas de sportifs indiens à haut niveau dans les compétitions internationales car ils ne passent pas les contrôles. Quand on connait les difficultés réelles, politiques ou économiques de la lutte contre le dopage, cela laisse songeur quant à la vie de ces athlètes… leur vie et son espérance.

    Le sport spectacle finit par faire oublier que l’homme a des limitations physiques. Bien que des progrès techniques et dans les préparations se fassent, ces limites doivent être acceptées et il convient de trouver d’autres façons de mettre en scène la vie et les « valeurs du sport ».

    Pierre-Ambroise Bosse fait référence à des périodes de découragement durant lesquelles il s’est questionné pour savoir si devenir champion du monde pouvait se faire « proprement ». Il se dit « triste de ce qu’il a observé ». Sa performance montre que plusieurs voies existent et que les choix personnels ont toute leur place encore aujourd’hui. D’où l’importance de s’interroger sur une part délaissée des préparations mentales que j’ai évoqué plus haut : l’état d’esprit.

    Dans quelle optique les sportifs s’entraînent-ils, dans l’absolu ?

    A mon sens, il convient de faire très attention au fait de privilégier la performance dans nos sociétés de consommation. Les athlètes deviennent à la fois des produits et des consommateurs de performance. Pas de place pour des choix personnels, la performance s’obtient en suivant tel ou tel chemin. Au-delà de la supercherie évidente de ce type de discours linéaire pourtant majoritaire aujourd’hui, c’est de la protection des sportifs qu’il s’agit. Rationaliser la performance et l’entraînement des champions potentiels est essentiel.

    Cependant, un sportif est un être humain et la subjectivité est constitutive de son humanité. Placer la performance devant le sportif quel que soit le prétexte est une négation de l’humanité des athlètes et qui est pourtant le monde réel. En effet, l’humanité du champion est ce qui peut le faire rater une compétition alors même qu’il est parfaitement préparé. A l’inverse, à l’instar de Vaultier à Sotchi et Bosse à Londres, cette même humanité transcende les athlètes et défie toutes statistiques.

    Préparations mentales et états d'esprit

     

    « La souffrance n’est point une chose obligatoire, ni même désirable, mais lorsqu’elle vient vers nous, comme elle peut être utile ! » MA

     

     

    Mathieu CHARON

    Liens vers les vidéos qui ont servi de base à cet article :

    Pierre Vaultier : L’inarrêtable

    https://www.youtube.com/watch?v=phU5MKQNTaQ

    Christophe Lemaitre : poursuis ton rêve quoiqu’il arrive https://www.youtube.com/watch?v=rP45rip4XU8

    Kévin Mayer : « La meilleure sensation de ma vie »

    https://www.youtube.com/watch?v=Z8fQwcxjkwE

    Pierre-Ambroise Bosse

    http://www.lci.fr/replay/replay-la-mediasphere-2017-du-17-aout-2017-2061569.html

  • La respiration : son action en préparation mentale

    respiration et préparation mentale

    1. La respiration, l’indispensable mouvement

    Selon le yoga, nous accomplissons le cycle respiratoire 21600 fois par jour en moyenne. Il est donc logique d’y consacrer une attention à la hauteur de cette ampleur. Dans cet article, je vous propose de découvrir comment la respiration influe sur tous les compartiments de notre pratique sportive. Bien sûr, sur un plan physiologique, mais elle a aussi une incidence fondamentale sur la gestion des émotions et des pensées, deux thèmes chers à la préparation mentale.

    Malgré cette importance évidente, force est de constater que nombre de techniques de préparation mentale font l’impasse sur la respiration. C’est aussi absurde que de vouloir se passer de son cerveau pour réfléchir. Les techniques et méthodes diverses se limitent majoritairement au seul aspect relaxation. Cela revient à réduire la respiration à un effet quasi accessoire produit par l’action sur elle. Au fil de l’article, je vous inviterai à réaliser quelques exercices d’observation afin de réaliser votre propre diagnostic et en tirer vos conclusions.

    Tout d’abord les effets les plus évidents seront abordés : ceux sur le physique, sur l’organisme puis ce sera le tour de l’émotionnel, l’énergétique. Nous nous intéresserons ensuite à l’incidence sur les pensées et donc la concentration. J’évoquerai la nécessité d’adapter sa respiration au sport pratiqué. En effet, on pourrait affirmer qu’il y a autant de façons de respirer que de sports… ou presque. Je conclurai avec des réflexions sur l’optimisation des performances et de la gestion des blessures, ce qui amène inévitablement à la question de l’éthique dans le sport.

    2. Respiration et condition physique

    • Réflexe ou acte conscient?

    Il est intéressant de porter attention aux différents termes qui désignent le souffle. Respiration désigne l’ensemble inspiration + expiration, un cycle de l’ordre du réflexe. Je ne me pose pas la question de respirer ou non. C’est comme ça, et heureusement. Il constitue la vie même, un processus qui s’adapte en continu. J’ai une activité ma respiration s’accélère, je dors, elle ralentit sans action volontaire de ma part. Cette adaptation s’effectue grâce au cerveau qui synthétise toutes les informations qui lui sont envoyées par nos différents sens et organes. En retour, il accélère ou ralenti le rythme en fonction des besoins.

    Cependant, il y a aussi ce que l’on retrouve avec la racine « pneuma » comme dans pneumologie. Ce terme désigne bien entendu les poumons et donc le souffle. Mais « pneuma » signifie : conscience. C’est ainsi un rappel que le souffle n’est pas seulement réflexe mais aussi potentiellement « conscientisable » ; qu’il possède une dimension également volontaire. Il est donc l’un des rares processus physiologiques possiblement à la fois conscient et inconscient.

    • La conscience de la respiration

    S’exercer à des pratiques respiratoires (respir) dans l’entraînement mental (pneuma) revient à retrouver et entretenir un lien corps/esprit souvent confus dans le sport de compétition. Ceci me semble essentiel. Le yoga a fondé tout un art sur la respiration : le pranayama. Il regroupe une multitude de techniques et peut intervenir sur des objectifs divers, du physique au mental en passant par le vital. C’est le cas aussi pour tous les arts martiaux l’insistance sur le travail du « khi » (ou qi, ou chi), du « hara » en est la démonstration.

    Sans entrer dans les détails de processus parfois complexes et nombreux, observer sa respiration permet d’augmenter la conscience de celle-ci. Réciproquement, plus la conscience du souffle se développe, plus les observations deviennent fines, subtiles et précises. Cela constitue un cercle vertueux.

    Avez-vous déjà pris le temps d’observer ce processus et ses liens avec sa (votre) réactivité aux événements ?

    • Des incidences majeures

    Pour insister sur les effets physiologiques essentiels, je citerai le rythme cardiaque. La respiration est en lien direct avec le cœur. Ainsi, une respiration non adaptée peut avoir des répercussions négatives sur la fréquence cardiaque. A l’inverse, une respiration « optimisée » permet d’alléger le travail du cœur, lui facilitant le travail en quelques sortes. Au plan sportif, cela se traduit par une récupération de meilleure qualité et plus rapide notamment. Le diaphragme constitue pour certain un « second cœur » tant il peut soulager le cœur lui-même.

    Toute la musculature bénéficie également de cette action consciente. L’oxygénation est essentielle, c’est le carburant principal des muscles associés aux nutriments. Le travail permet d’augmenter la capacité respiratoire et d’adapter son utilisation en fonction des nécessités. La détente musculaire potentiellement induite, permet de limiter également les tensions inutiles… et indirectement, a une action favorable sur les contractures, crampes etc…

    respiration et préparation mentale

    3. Respiration et énergie

    • Généralités

    J’utilise « énergie » pour désigner la respiration sous son aspect de carburant pour le corps. Cet aspect « fluide » correspond mieux, également, pour imager la gestion des émotions et du stress.

    Nous avons déjà évoqué l’aspect carburant. En effet, l’oxygène est essentiel au bon fonctionnement du corps et, donc, une bonne ventilation est nécessaire. Elle doit être adaptée, ni trop pour ne pas être en hyperventilation (tête qui tourne) ni trop peu c’est à dire ne pas avoir de quoi alimenter correctement l’ensemble de l’organisme.

    On associe fréquemment la respiration à la relaxation. Cependant, c’est un raccourci tout à fait erroné. En effet, sa maîtrise n’est pas plus liée à la détente qu’à la tension du corps. Il y a, dans la culture contemporaine, une propension à vouloir supprimer ou, à défaut, réduire ce qui pose problème plutôt qu’à le comprendre. Les émotions sont considérées, dans le milieu sportif, comme des perturbations bien plus que comme des facilitateurs. On se prive ainsi de tout le potentiel énergétique et motivationnel de celles-ci. Le travail respiratoire ou énergétique permet de faire descendre le niveau d’une émotion, d’un stress aussi bien qu’elle peut le faire monter. Il s’agit d’adapter l’expression aux circonstances.

    D’un point de vue pratique, les « problèmes » avec la gestion de certaines émotions chez les sportifs se manifestent la plupart du temps par des blocages de la respiration. La peur, par exemple, inhibe le souffle (« avoir le souffle coupé »). Cela induit un déficit d’oxygène augmentant l’impact du stress sur l’organisme. La colère a l’effet inverse en mobilisant une quantité considérable de ressources, possiblement de façon excessive, on devient « rouge de colère », on « explose de colère ».

    Pour améliorer la gestion du stress en compétition, il ne s’agit pas de faire un travail approfondi de l’ordre de la relaxation, ce à quoi on aurait pu s’attendre de prime abord : « je suis trop tendu, je réponds en me relaxant », « je ressens de la colère » avant l’explosion ‘je me relaxe » pour annihiler tout ça. Le plus pertinent est de loin, de s’assurer que le souffle circule librement et en toutes circonstances (colère canalisée, stress adpaté etc…). La relaxation peut compléter ce travail mais dans un second temps seulement. On trouve régulièrement des propos de sportifs rapportant que la relaxation bénéfique en premier lieu, les prive rapidement d’un influx nécessaire à l’expression de leur motivation. On se sent bien, mais on ne reste pas performant. Ce n’est donc pas notre recherche.

    • Les étages respiratoires : le baromètre

    On peut décrire trois façons de respirer. La respiration abdominale qui correspond à la respiration des jeunes enfants et devrait être celle que tout le monde adopte au repos. Elle est facile à remarquer : à l’inspiration, le ventre se détend provocant une aspiration passive de l’air. La cage thoracique reste immobile.

    La seconde façon de respirer est la plus habituelle. Celle qui consiste à utiliser le diaphragme dans la mesure des possibilités individuelles. Cela se traduit par l’expansion de la cage thoracique à l’inspiration et sa rétraction à l’expiration. On est déjà dans un processus nettement plus actif.

    Enfin, on trouve la respiration claviculaire (ou sous-claviculaire). Dans cette version, ni le ventre, ni la cage thoracique ne bouge. On remarque un léger mouvement du haut du corps, très haut, vers les clavicules. Les épaules partent un peu vers l’arrière à l’inspiration et reviennent en avant à l’expiration. C’est d’un certain point de vue, la plus active (au sens négatif du terme).

    En temps normal, plus la respiration est « haute », plus elle est rapide et saccadée et également plus elle demande d’effort pour être effectuée. Cela constitue ainsi un excellent baromètre du niveau de stress et de la difficulté ou non à gérer ses émotions (conscientes ou inconscientes).

    En effet, on remarque chez les sportifs une respiration au mieux thoracique, et souvent des arrêts respiratoires, y compris durant les phases actives. Ce qui a des conséquences tant physiques que psychologiques : fatigue physique, fatigue mentale, davantage de pensées parasites, hypoxie. A celles-ci, se rajoutent les effets en cascades, les effets qui découlent des premiers : pertes de lucidité, manque de motivation, perte de confiance en soi etc…

    A vous de jouer ! Observer de nouveau votre façon de respirer au regard de ces éléments… Profitez-en pour analyser vos émotions, vos réactions, vos comportements à partir de ceux-ci. Vous aurez sans doute quelques surprises et de nouveaux axes de travail.

    respiration et préparation mentale

    4. Les incidences sur le mental

    • La relaxation mentale

    La plupart du temps, quand on parle de relaxation, on envisage les choses sous l’aspect musculaire. On ressent de la détente, un mieux-être suite à une séance. La détente musculaire est intimement liée à l’activité mentale. En effet, il est bien difficile de se détendre avec un mental agité ou d’être tendu avec un mental calme. D’où la pertinence de l’utilisation courante des techniques consistant à visualiser des images inspirant le calme au cours des séances de relaxation.

    La relaxation mentale consiste à privilégier l’apaisement mental pour parvenir à la détente du corps et non l’inverse. Précisons toutefois qu’il est possible de combiner différentes approches suivant les besoins et les personnalités.

    • Le cerveau : un gros consommateur

    Je n’ai toujours pas évoqué le cerveau dans ses liens avec la respiration. A lui seul, il consomme 20 à 25% de l’oxygène disponible. Cependant, il y a une différence. Pour simplifier, les muscles se servent des ressources dont ils ont besoin. Même s’il y en a davantage, cela n’a pas une grande incidence. En revanche, le cerveau utilise ce dont il a  besoin pour son fonctionnement. Mais s’il y a encore de quoi faire alors cela peut faciliter la dispersion mentale en augmentant l’activité cérébrale, notamment avec la fabrication de pensées parasites. On peut faire l’analogie avec l’utilisation de certaines boissons énergisantes ou certains produits dopants, qui stimulent tellement qu’elles occasionnent un fonctionnement mental débridé. On gagne en énergie, mais on perd en maîtrise.

    De la même façon, une personne stressée aura tendance à accélérer sa respiration, ce qui augmentera l’oxygénation et pourra entraîner un sentiment de perte de contrôle. C’est ce qui se passe lors d’une crise d’asthme. La méthode « artisanale » pour la calmer en l’absence de médicament consiste à respirer dans un sac en papier. Au fil des respirations, l’air s’appauvrit en oxygène. Le cerveau qui panique se retrouve privé de son carburant. Il se calme alors automatiquement, mécaniquement en quelques sortes… et avec lui la respiration retrouve un rythme adapté.

    Pour un sportif, le même principe doit être gardé en tête. En particulier, dans des sports avec de longues durées de temps morts comme le tennis par exemple. Ce type de sport est en effet propice au bavardage mental et donc aux fluctuations de concentration.

    Maîtriser sa respiration constitue ainsi un outil particulièrement efficace pour gérer sa concentration et ses émotions, peut-être même le plus efficace. Cette maîtrise permet d’économiser toute l’énergie dépensée dans le bavardage mental ou dans la gestion classique des émotions qui ressemble souvent à une lutte féroce. Ainsi, de fil en aiguille se créé un cercle vertueux : la respiration contrôlée permet de gérer ses émotions et sa concentration qui permettent à leur tour d’approfondir la respiration qui permettra, plus tard, d’accéder à des concentrations plus intenses. Je vous laisse libre d’en imaginer les avantages dans une pratiques sportives en compétition ou du point de vue de l’intégration de schémas tactiques ou  d’apprentissages techniques. Plus la concentration est forte et continue, plus la mémorisation sera fidèle, facilitée et rapide. Cela constitue un gain de temps potentiellement considérable.

    respiration et préparation mentale

    5. A chaque sport sa respiration

    La respiration est composée de trois grands champs d’expérimentation : l’inspiration, l’expiration et… les espaces entre les deux. Selon le sport pratiqué ou selon les besoins, on mettra l’accent sur une partie ou une autre.

    • L’inspiration

    L’inspiration correspond à l’aspect énergisant, à la mise en tension. On prend de l’air, on prend du carburant. Favoriser l’inspiration correspond donc à augmenter les ressources disponibles. Comme nous l’avons vu, cela devra être adapté à l’activité car trop d’oxygène peut produire des effets contre-productifs. Sur un plan pratique, il est généralement recommandé d’inspirer par le nez afin de mieux contrôler la prise d’air. En effet, par la bouche, la tendance est de prendre « trop » d’air. Cependant, suivant les sports, ce n’est pas toujours possible, surtout au début. Il existe d’autres façons de contrôler cette prise d’air comme effectuer un léger resserrement de la gorge par exemple.

    • L’expiration

    L’expiration, quant à elle, correspond à la détente. C’est pour cela qu’il est souvent recommander d’expirer sur l’effort, ou durant les étirements. Pendant les temps-morts, allonger les expirations peut permettre de favoriser le relâchement, une meilleure gestion du stress. Dans ces périodes, il peut être recommandé de consacrer un temps à l’inspiration pour deux ou plus d’expiration. C’est-à-dire que l’on passe deux fois plus de temps avec le même volume initial, ceci est globalement la respiration « normale », hors stress. On peut approfondir le relâchement. Par exemple, 8 secondes d’inspiration pour 16 secondes d’expiration au repos et allonger progressivement

    • Les espaces entre-deux

    Les espaces entre les inspirations et expirations sont assez peu appréhendés en dehors du yoga ou de la sophrologie. Ils constituent pourtant un réel champ d’expérience. Il suffit de s’intéresser aux apnéistes pour le constater. Les conséquences physiologiques et psychologiques peuvent être riches de découvertes et d’intérêts. Non maitrisés, ces espaces offrent un nid douillet aux blocages émotionnels.

    • Des exemples

    On pourrait imaginer qu’une pratique idéale serait constituée par une utilisation suffisante mais minimum du souffle. Suffisante pour le fonctionnement du corps, minimum pour favoriser la concentration. Pour prendre un exemple, un joueur de tennis effectue souvent 3 à 4 respirations pour un aller-retour de la balle. Il est très facile de se contenter d’une seule respiration pour satisfaire au besoin de l’organisme. Une telle application permet de créer une bonne base à la concentration. Une respiration habituelle entretient le stress plus qu’autre chose. A titre indicatif, en réduisant au maximum, on peut parvenir à effectuer 6 à 8 allers-retours de la balle sur une seule respiration (expérimentation personnelle). Bien que cela ne soit pas souhaitable dans la longueur pour l’organisme, cela permet de voir la marge qui existe avec les 3 à 4 effectuées en temps normal.

    Comme vu plus haut, l’apnée, suivant le travail voulu, insistera bien entendu sur les rétentions et comment les prolonger notamment avec les techniques de concentration et de visualisation. Les techniques respiratoires préalables auront pour but d’aider à la prolongation des arrêts de souffle.

    Dans les épreuves de tirs, les rétentions sont essentielles. Dans les sports de combats, on peut aisément gagner en puissance et en percussion grâce à elles en les associant à une expiration énergique. Ceci est également valable pour les sports de raquettes.

    Lorsqu’on cherche à accroître la capacité respiratoire, pour la natation par exemple, une part importante du travail concerne l’inspiration.

    Les expirations ont notre préférence pour approfondir le relâchement, dans le stretching par exemple. Elles sont particulièrement utilisées dans toutes les phases intermédiaires (hors efforts) pour améliorer et accélérer la récupération. Dans la course à pied la respiration et en particulier les expirations donnent un rythme plus précis à la dynamique de course.

    respiration et préparation mentale

    6. Optimisation des performances et éthique sportive

    • Optimisation des performances

    Dans le déroulé de cet article, vous avez pu constater qu’il existe un champ d’expérience considérable avec la respiration. Il existe tout un tas de façons de travailler celle-ci, je vous ai proposé quelques petites observations pratiques à réaliser.

    Dans le cadre d’une pratique de compétition, la respiration a un intérêt majeur pour l’optimisation des performances. Comme je l’ai dit, il s’agit d’adapter des fonctionnements physiologiques autant que mentaux habituellement laissés à une gestion automatiques, inconsciente et la plupart du temps grossière.

    Au-delà d’une simple prise de conscience, il s’agit d’effectuer un véritable travail de fond dont les premiers fruits se font sentir rapidement. Les répercussions ne se limitent pas aux performances bien entendu. Elles sont nombreuses dans le quotidien. Une meilleure maîtrise du souffle correspond à une meilleure maîtrise de soi. Dans la vie, c’est un plus grand recul qui s’impose sur les événements et notre réactivité. Notre attitude face à eux nous permet de moins subir et d’être beaucoup plus combattif… n’est-ce pas une qualité essentielle à tout sportif ?

    Nous vivons dans une société de consommation. Le sport n’échappe pas à la règle. Les plus médiatisés tout particulièrement. La performance n’y échappe pas non plus. C’est ainsi qu’on arrive à confondre, optimisation des performances avec travail déraisonné. Cela se remarque avec le volume de travail. Beaucoup de sportifs pensent que s’entraîner plus amènent à la réussite quasi-automatiquement, en oubliant de s’entraîner mieux. Sur le plan psychologique, il en va de même avec l’adage selon lequel il faut souffrir pour être performant. Ce qui est vrai d’une certaine façon à haut-niveau. Mais attention au curseur. Il faut savoir ce que l’on est capable d’endurer, soi, son corps, son psychisme. C’est ce qui fonde l’art de la performance. Le sportif est au centre et la performance est son outil de réalisation et non une finalité en soi.

    • L’éthique sportive

    Ces réflexions m’amènent à faire un pas de plus. En effet, ce travail de fond est essentiel selon moi. Essentiel en ce qu’il permet l’accès à une connaissance personnelle qui autorise ou non à savoir jusqu’où on peut aller.

    Les entraînements non raisonnés conduisent très souvent à des blessures. Des blessures physiques possiblement chroniques. Mais aussi des blessures psychologiques. Le sport de compétition peut facilement devenir un fléau. A haut-niveau il y a régulièrement des articles sur le sujet. Mais force est de constater qu’il n’y a pas besoin d’aller si haut.

    Incorporer un travail de connaissance de soi permet de prévenir de nombreux aléas. Ces derniers sont souvent banalisés dans le monde du sport. On les considère normaux, il faut en passer par là… Ce n’est pas le cas de toutes les cultures sportives et de la performance. Cela semble plutôt correspondre à une absence de culture véritable. Aujourd’hui, nous avons largement les connaissances et les outils pratiques pour permettre un travail de qualité respectueux de soi et du corps. Mais il faut, pour cela, en passer par une réflexion éthique et une sensibilisation des sportifs, c’est le rôle des institutions.

    Le travail de la respiration constitue un outil de connaissances et d’expérimentation de soi allant dans ce sens. Il l’est au même titre qu’un véritable travail sur la concentration. En somme, au même titre qu’un travail mental en général…

    respiration et préparation mentale

    Mathieu CHARON

  • Concentration et préparation mentale

    1. Concentration et préparation mentale : Introduction

    La concentration est un des axes majeurs d’un travail en préparation mentale. Il convient cependant d’apporter quelques précisions. Qu’est-ce que la concentration ? On se limitera à deux principaux points de vue. Ils ne sont pas forcément inconciliables dans les faits, mais correspondent à des réalités pratiques différentes.

    La première est que la concentration va de soi à partir d’un certain niveau. Ainsi, la concentration se résume à la restitution d’un apprentissage. A partir de là, il est évident qu’un niveau ayant été atteint à l’entraînement pourra l’être possiblement en compétition. Le travail se centre donc sur les circonstances qui permettent de rendre possible une restitution équivalente en stress ou non. Les techniques comme la PNL, l’hypnose dans une certaine mesure, l’utilisation des routines, entre autres, vont dans ce sens. Une importance forte est accordée à l’attitude, aux valeurs, au « langage du corps ». Tel un peintre, on travaille en agissant touches par touches sur tout ce qui peut faire obstacle au bon déroulement des choses. Le but est que le sportif accède à son plus haut potentiel sans être parasité par les émotions. En préparation mentale aujourd’hui, c’est l’approche la plus répandue. Il y a suffisamment de références sur le sujet, je n’en parlerai pas ici.

    Dans cet article, je souhaite aborder une seconde façon de voir. En effet, à l’heure actuelle un outil revient en force parce qu’employé par de nombreux sportifs de haut-niveau : la méditation. Il est possible de décrire celle-ci comme le prolongement d’un état de concentration intense. La concentration est donc vue comme un processus bien plus complexe que dans la première approche. Ce n’est pas le niveau atteint par l’apprentissage technique et physique qui fixe le niveau de concentration bien qu’il y soit lié. Mais, ce niveau peut en être en grande partie indépendant. A ce titre, il se travaillera séparément autant qu’en lien avec la compétition, autant en salle que sur le terrain. L’hypothèse est que l’amélioration de la concentration peut permettre aux autres champs (techniques, physiques, tactiques) d’être tous tirés vers le haut, d’être plus efficaces, plus rapidement, plus durablement.

    concentration et préparation mentale

    2. Ce que la concentration n’est pas

    Je vais m’attacher à définir la concentration au fil de l’article, en commençant par ce qu’elle n’est pas. J’aborderai un certains nombres de termes avec lesquels on la confond souvent. Ensuite, j’alternerai réflexions et exercices pratiques qui feront office de définition.

    1. L’analyse et la concentration

    Souvent, on entend « concentre-toi ! » et si on demande comment faire, au mieux, on nous répète la même chose, au pire, on entre dans une explication longue et ennuyeuse. La concentration semble soit indéfinissable, soit une sorte de super-analyse. Un sportif  de haut niveau pourrait donc se comparer à un super calculateur, un méga-stratège, un hyper-joueur d’échecs. Assurément, peu de sportifs se reconnaîtraient dans la description. Un athlète éprouve une sensation de liberté bien plus qu’une activité mentale débridée.

    Quoiqu’il en soit, elle ne nous intéresse pas ici. Notre concentration n’est pas réflexion ou alors peut-être au sens de refléter. Le raisonnement et l’intellect n’ont pas leur place ici. L’investigation, la gymnastique cérébrale, les gadgets psychologiques ne sont pas non plus notre recherche

    2. Mystère mystère !

    Parfois, on associe à la concentration, une recherche un peu mystérieuse. La recherche du flow, de « La Zone », le graal du sportif. Cet état où tout réussi, où l’on semble être invulnérable et on transcende nos performances habituelles.

    La plupart du temps, cette « zone » est subie et concerne un moment très bref dont le sportif ne garde qu’une vague impression, si ce n’est celle d’une fatigue intense. La qualité de la performance étant rapportée par les personnes présentes ou suggérée par des souvenirs de sensations fortes. D’ailleurs, l’expression même de zone est intéressante en ce qu’elle renvoie à un ailleurs on ne sait où. De plus, mal généré, cet événement peut avoir des retentissements négatifs importants voire dangereux. Ce n’est donc pas notre proposition.

    3. Conditions à la pratique de la concentration

    1. Etablir un cadre

    Notre objectif est d’utiliser la concentration en mouvement, évident puisqu’on parle de pratique sportive. Mais, pour une meilleure efficacité, on travaillera autant immobile qu’en bougeant. Comment créer sa propre discipline personnelle ?

    On cherche à expérimenter ici un état conscient, calme, et focalisé. L’immobilité (psychique) est donc parmi nos objectifs. Dans ce but, on privilégie une pratique quotidienne ou tous les deux jours à heure fixe. La durée dépend de ce dont vous disposez et de votre investissement personnel. Conseil : ne pas se surestimer en optant pour des durées trop longues. Il est préférable d’installer d’abord la régularité puis la durée. Un minimum pour commencer pourrait être de 15min.

    Le lieu est important également. Assurez-vous simplement de ne pas être dérangé(e) durant la réalisation du ou des exercices. Le moment de la journée importe peu. Malgré tout, le matin permet en général une meilleure tranquillité d’esprit. Le soir demande davantage de temps pour apaiser le fonctionnement mental du fait des excitations de la journée. Avec la régularité,  ces variations s’estompent rapidement.

    On ajoute aux éléments qui incitent à la concentration : une lumière légère, un lieu calme voire silencieux, des vêtements amples (pour éviter toute sensation désagréable). Ces éléments ne sont pas absolument indispensables pour établir une concentration de qualité mais, en particulier au début, ils ont un intérêt certain.

    2. L’attitude générale

    Là encore, il ne s’agit pas d’éléments incontournables, mais, ils orientent vers la concentration. Tous ces petits bouts de chandelles mis ensemble simplifient bien les choses. Ils permettent également d’assoir une discipline personnelle naissante sur le sujet. Les indications que je donne proviennent du yoga, réputé pour ces nombreuses techniques de concentration.

    La posture générale : on choisira de s’assoir en tailleur ou en lotus ou demi-lotus (ces dernières sont plus stables à condition de pouvoir les prendre). S’assoir sur un coussin permet une bonne rectitude de la colonne vertébrale. Vérifier de temps en temps la verticalité dans un miroir ou dos au mur.

    Les mains : posées sur les genoux immobiles. Ne dit-on pas « parler avec les mains » ? L’attention sur leur immobilité est importante. Avoir les bras tendus permet d’éviter qu’ils influencent la verticalité de la colonne. Si l’on choisit de rester debout, on conserve les mêmes attentions, les bras pendants le long du corps, les jambes légèrement fléchies.

    La tête : reste droite, le menton rentré. Imaginer qu’elle est suspendue par un fil, le maintien se fait en toute légèreté ; sans contrainte, il s’agit de naturel. Le corps est immobilisé pour faciliter la fixation de l’esprit par la suite.

    Les yeux : ouverts ou fermés selon l’exercice choisi. Le regard devra être le plus fixe possible. Les mouvements oculaires sont utilisés pour mesurer l’activité cérébrale. Par un maintien correct, on incite le mental à l’apaisement.

    La langue : faites l’expérience : énoncez une phrase dans votre tête et vous verrez que votre langue bouge légèrement bien que vous n’ouvriez pas la bouche. On proposera ici de la fixer derrière les dents du haut.

    La respiration : on laissera aller simplement. Au fil de l’exercice, un indicateur de concentration sera l’apaisement de la respiration et la régularité qui s’installe naturellement. concentration et préparation mentale

    4. Concentration statique vs dynamique

    1. Concentration statique

    La concentration est plus facilement induite par l’immobilité. L’immobilité physique favorisera ainsi l’immobilité mentale. C’est pourquoi je recommande d’accorder de l’investissement à l’extérieur des terrains de sport. Dans un premier temps, il s’agit de prendre conscience de ce qui se passe : la ronde des pensées. La respiration entretient aussi un lien étroit avec la pensée et les émotions. L’un influence l’autre et réciproquement. Il est important de comprendre comment ça marche en l’expérimentant. C’est pourquoi je ne pousse pas plus la description.

    Avec l’entraînement, on se rend compte que des ruptures de l’attention se succèdent environ toutes les 3 à 5 secondes. Cette prise de conscience est fondamentale. Car, c’est elle qui nous permet de comprendre l’importance de ce travail. En effet, sans travail spécifique, champion ou non, la concentration est fragmentée. L’objectif de l’entraînement est de rendre ces ruptures de moins en moins fréquentes. Ce travail demande un approfondissement des exercices difficilement accessible en mouvement. D’où la complémentarité des deux approches.

    2. La concentration dynamique

    Dynamique, au sens de : en mouvement. Le travail statique doit nous permettre de prendre conscience que l’on peut distinguer immobilité physique et immobilité psychique. En effet, lorsque l’on expérimente cela, alors le fait de bouger perturbera nettement moins la concentration. On insérera avec intérêt des exercices en mouvements lents pour servir d’intermédiaires à l’intégration de la concentration dans l’activité sportive de compétition.

    J’insiste sur le fait qu’il faut en faire l’expérience, le vivre. La compréhension intellectuelle comme nous l’avons vu ne permet pas ces prises de conscience. Elle permet de les comprendre mais pas de les intégrer.

    La pratique de la concentration dynamique aura d’autres impératifs. Notamment, de prêter attention à l’intensité. Celle-ci doit être adaptée au sport pratiqué : quelques exemples :

    • Le tennis : la balle reste 2 millisecondes dans le cordage. C’est là que l’intensité doit être maximale. Maintenue à ce niveau plus longtemps, c’est l’épuisement assuré sur la longueur d’un match. Il conviendra donc d’alterner l’intensité de l’attention au sein de l’échange lui-même mais également dans la gestion des nombreux « temps-morts ». Entre les points (qui durent environ 20s pour les plus longs), entre les jeux, entre les sets. La récupération psychique est fondamentale.
    • La boxe : la concentration devra être extrême mais sur le temps d’une reprise… court 3min. Ici, aucune rupture de l’attention avant la fin de chaque reprise.
    • Le marathon : aucun intérêt pour une concentration très forte. Elle conduirait à un épuisement physique et mental. Il s’agira de trouver la juste intensité pour ne pas se disperser et la maintenir sur plusieurs heures.
    • Le football : suivant le poste, il faudra adapter. Il convient de travailler une concentration commune à l’équipe en plus de la concentration individuelle. Aussi surprenant que cela puisse paraitre, on peut aussi travailler la concentration à plusieurs.

    Ces différentes façons d’utiliser la concentration s’intègreront au fur et à mesure de l’expérience jusqu’à s’installer spontanément. (Je ne dis pas automatiquement car la concentration ne doit jamais être automatique sous peine d’ouvrir la porte à la dispersion, ceci se constate très vite dans la pratique statique, en sport de combat par un KO).

    5. Exercices pratiques

    Je propose ici 3 exercices concernant la partie extérieure au terrain. Celle pour laquelle on dispose du moins d’éléments lorsqu’on en fait une recherche rapide. La concentration implique 3 paramètres : un objet sur lequel porter son attention, soi-même et la relation entre les deux. L’objectif final de la concentration pourrait être de ne plus percevoir aucune différence entre soi et l’objet. Il y a en quelque sorte fusion, plus aucun des trois éléments, et, par conséquent, plus d’acte de concentration…basculerait-on dans l’état méditatif ? Qui sait ?

    Les objets les plus fréquents concernent les sens visuel et auditif. J’aborderai également l’aspect tactile.

    1. Concentration visuelle

    Placer une bougie allumée devant soi entre 50/80cm, à la hauteur des yeux, puis déposer le regard sur la flamme. Rester attentif à tous les éléments vus précédemment : postures, fixité du regard. 1 à 2 minutes les yeux ouverts puis autant les yeux fermés et ainsi de suite.

    Une attention particulière est accordée à la respiration. En effet, celle-ci doit s’apaiser d’elle-même, mais ne doit pas être bloquée par l’intensité, par « l’effort » de concentration.

    La concentration est ici portée à l’extérieur, sur la flamme, et, à l’intérieur, sur l’image mentale de celle-ci. Elle peut apparaitre comme en négatif, au sens photographique. Le travail consiste à percevoir cette image puis la fixer. Au début, elle s’agite, n’apparait que vaguement ou de façon fugace. C’est l’entraînement, l’approfondissement de la concentration qui rend ces perceptions possibles. concentration et préparation mentale

    2. Concentration auditive

    On garde les yeux fermés. L’exercice se fait en 3 étapes. Après avoir pris soin de vérifier les points préalables, placer l’attention sur un son extérieur. Un son un peu ronronnant est parfait. Vous pouvez opter pour un enregistrement qui s’arrêtera au bout de 5 min, sons des vagues, du vent, ce ne sont pas les applications mobiles qui manquent de propositions.

    Puis, 5 min supplémentaires, placer l’attention dans l’espace entre les oreilles, dans la tête et persévérer jusqu’à percevoir comme un son. Le son extérieur disparaît et laisse sa place à un son intérieur et intensifie la concentration.

    Enfin, « lâcher » ce son intérieur pour laisser s’installer le silence, 5 minutes supplémentaires. Penser à vérifier régulièrement le maintien des éléments préalables. concentration et préparation mentale

    3. Concentration tactile

    Un exercice souvent effectué allongé. Ici, on y préfèrera l’assise. Les yeux sont fermés. Passer en revue chaque partie du corps, en reliant image et sensation. Les jambes, les bras, l’abdomen, la cage thoracique, le cou, le visage puis à le même parcours à l’envers.

    S’attacher à ressentir les sensations de façon tactile. Visualiser (imaginer) chaque zone du corps pour en accentuer la perception. Cet exercice peut être difficile au début. Plus vous le pratiquez plus les perceptions s’affinent. Associée au sport, cette pratique constitue  un véritable facilitateur et accélérateur de l’apprentissage.

    6. Les bénéfices de la concentration

    Comme vous avez pu l’apercevoir, les exercices proposés s’appuient sur la vie de tous les jours. Rien d’extraordinaire. On utilise ce qui est là. On prend conscience de ce qui se passe. Forts de cette connaissance on agit. Les fruits de ce savoir sont multiples. En effet, améliorer sa concentration est utile quel que soit le domaine de la vie.

    1. Au quotidien

    Une meilleure concentration permet d’être moins sujet au stress et aux émotions en général. Elle permet d’être plus en recul sur les événements.

    Ce recul s’installe, au fur et à mesure de l’expérience comme un processus naturel et bénéfique pour ne pas dire régénérateur tant on est souvent victimes de nos émotions. Le calme et la sérénité prennent place. Progressivement, l’attention recherche spontanément à se fixer sur un objet. Ce qui permettra de pratiquer n’importe où, n’importe quand. Dans les transports en commun (sur le son du métro), en marchant (sur la sensation du souffle), en courant (en fixant un point), en mangeant (sur le goût), tout peut devenir prétexte à la concentration.

    Etre concentré au quotidien, c’est sortir dans cette fiévreuse tendance à penser toujours plus, encouragée vivement par les sollicitations innombrables de nos modes de vie actuels. Ainsi, nous économisons une quantité d’énergie considérable. Cet ensemble a des retentissements sur le sommeil, la vigilance, la productivité, la vitalité, sentiment de fatigue, l’anxiété etc…

    Nous passons d’une pratique à un état d’esprit qui devient lui-même pratique à part entière et ainsi de suite, un véritable cercle vertueux.

    2. En compétition

    Vous commencez certainement à entrevoir les nombreux intérêts d’un tel entraînement en compétition. C’est la qualité de l’apprentissage et plus précisément de la restitution qui est en jeu. Parvenir à être concentré en compétition, avec des pratiques adaptées à soi et à son sport permet de ne plus être affecté par les émotions de la même manière. Ainsi, tous les artifices tendant à apprivoiser les ressentis, à dialoguer, à communiquer n’ont plus d’intérêt. On coupe le problème à la racine.

    Les détracteurs de cette pratique renvoient que cela se traduit donc par une perte de sensation, une absence de ressentis si chers au sportif. Une espèce de vécu fade et déconnecté de la réalité. Si vous avez lu attentivement cet article, vous comprendrez aisément qu’il en va exactement du contraire. Le superflu est battu en retraite et l’essentiel en sort renforcé.

    Les sensations, le plaisir en compétition est nettement supérieur chez un sportif conscient de ce qu’il vit grâce à la concentration que chez un sportif en mode automatique. Le mode automatique est un mode qui convient à l’entraînement physique mais pas à l’entraînement mental. Sinon, cela revient à le réduire à ce qu’il n’est pas : un organe comme les autres. Le mental/le psychisme n’est pas juste le cerveau, juste les pensées. Par ailleurs, comme vous avez pu le lire, je n’ai quasiment pas utilisé les termes d’intellect, de pensée tout au long d’un article sur la concentration. En revanche, ce sont les sensations, la pratique, le concret qui ont primés.

    La concentration est un travail qui se vit au travers du corps. Elle s’expérimente dans les tripes même du sportif bien plus que dans son cerveau.

    7. Ouverture et perspectives

    Très loin d’être exhaustif, cet article se veut une ouverture pour un meilleur travail de la concentration. Elle n’est ici pas considérée comme un paramètre accessoire de la performance mais comme une des fondations même d’un mental efficace et efficient pour les sportifs. Les athlètes qui se tournent aujourd’hui vers la méditation ont tous des années de pratiques de ces exercices pour en arriver aujourd’hui à la stabilité et la force mentale qu’on leur connait. Rome ne s’est pas construite en un jour, un mental ne le peut pas plus. Je m’inscris en faux contre les approches qui relègueraient la préparation mentale à un simple outil. C’est bien plus que cela. A très haut niveau, c’est la base de toute chose. C’est ce qui rend possible l’exploit ou plus modestement la performance. Bien sûr, les années de travail physique et technique sont capitales. Mais à quoi sert tout le talent du monde s’il ne peut s’exprimer qu’à 50% à cause d’une émotion ou une pensée gênante ?

    Par ailleurs, dès l’instant qu’on est doté d’un mental, il n’est pas nécessaire d’attendre d’être à très haut niveau pour en faire l’expérience. C’est là encore un a priori que l’on entend couramment de la part de certaines élites sportives. C’est à mon sens une des raisons pour lesquelles le sport français est souvent en retard dans ce domaine. Les athlètes commencent à s’intéresser « sérieusement » au mental alors que leurs homologues ont déjà des années de travail derrière eux. Cela fait que nos champions arrivent souvent plus tardivement que les autres malgré des infrastructures bien supérieures à celles de la plupart des pays du monde.

    Enfin, Il faut bien commencer quelque part. Les exercices de base que j’ai proposés ici ne sont qu’une toute petite esquisse qui permet d’appréhender ce champ d’expérience qu’est le mental. En compétition, que l’on soit amateur ou professionnel, la saveur d’être allé au bout de ses capacités, d’avoir « tout donné » vaut bien plus que la victoire en elle-même. Sinon, pourquoi ceux qui ont tout gagné continuent malgré tout ? Au vu des sacrifices nécessaires pour accéder au plus haut niveau, cela n’en vaudrait certainement pas la peine. En revanche, apprendre de soi-même : c’est cela être un champion.

    Les perspectives sont illimitées. L’état d’esprit est celui de la connaissance et de la progression. Il est évident que les résultats sont une des conséquences logiques d’un tel travail même si on ne les recherche pas de prime abord.

    Je vous souhaite une bonne expérience pour celles et ceux qui se donneront les moyens de celle-ci. C’est un travail de longue haleine, plein de surprises dont les fruits sont proportionnels à l’investissement personnel.

  • Le Yoga : du sportif à l'athlète intérieur

    Le Yoga fait son grand retour dans les pratiques sportives ces temps-ci surtout sur l’angle de l’optimisation de la condition physique. C’est le premier point que j’aborderai. Mais le yoga, ce n’est pas seulement ça. Sensible à cet exercice, les sportifs se dirigent beaucoup vers des yogas dits « posturaux » c’est-à-dire qui insistent surtout sur la position du corps, l’alignement des articulations, des lignes de forces. Ces yogas sont souvent dynamiques, l’attrait est donc naturel pour des sportifs.

    Cependant, bien que ce soit un point intéressant,  est-ce vraiment le plus intéressant pour un compétiteur à haut niveau ? La réponse ne saurait être simple. Le yoga aime les paradoxes, la compétition aussi.

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    Comme souvent, c’est par la voie de l’entretien du corps que l’on appréhende le yoga, puis, le temps passe et on découvre d’autres pratiques souvent plus statiques, du moins en apparence. On part alors à l’aventure de techniques aux noms tous plus exotiques les uns que les autres : « prânâyâma », « mudrâ/bandha », « mantra », « dharâna », « drishti », « dhyâna ». Des traductions ont été proposées pour chacun d’entre eux, respectivement souffles, gestes/contractions, son, concentration, techniques oculaires et méditation. Cependant, elles n’ont qu’un intérêt relatif car elles ne permettent pas de saisir l’ensemble des aspects de chaque pratique, elles n’en offrent qu’un pâle résumé… utile néanmoins sur un plan pédagogique.

    J’aborderai donc ce que l’on recherche au travers de ces pratiques millénaires et surtout ce que l’on vise avec des sportifs. Se découvrir « athlète intérieur », comme dirait Dan Millman, est le chemin auquel invite le yoga. Je vous propose aujourd’hui d’esquisser quelques  potentialités dévoilées par ce véritable laboratoire intérieur.

    1. Préalables : de l’expérience à la science

    Le yoga est une pratique ou plutôt une méthode qui regroupe un très grand nombre de techniques transmises depuis des centaines et des centaines d’années. Sa particularité est d’être une discipline qui s’expérimente. Aucun dogme, aucun chemin préétabli, seulement une multitude de procédés à expérimenter. A chacun d’en tirer ses conclusions quant aux effets et à l’efficacité. En général, on retrouve les mêmes effets en appliquant les mêmes techniques. Les mêmes causes entraînant les mêmes conséquences.

    De ce point de vue, on pourrait dire que c’est une discipline scientifique, bien que les yogis ne revendiquent aucunement un tel statut. Les techniques sont expérimentées et reproduites des milliers de fois, dans des conditions identiques et différentes qui induisent des effets similaires au travers des temps. Rares sont les disciplines qui peuvent revendiquer un tel patrimoine, un aussi grand nombre de reproductions, une telle rigueur depuis si longtemps.

    Aujourd’hui, le développement de l’imagerie médicale offre un nouveau regard sur cette méthode dévoilant à sa façon, des effets expérimentés depuis des siècles. La pleine conscience, bien que concept bouddhiste, a bénéficié des apports techniques du yoga (body-scan, visualisations, postures) dont les pratiques méditatives bien antérieures ont largement inspiré celui-ci. Les articles scientifiques sur ces techniques foisonnent dans la littérature scientifique ces temps-ci.

    Dans un autre registre, pour l’obtention de son doctorat en physiologie, Florence Villien a montré des effets significatifs d’augmentation de la capacité respiratoire et de diminution de la fréquence cardiaque chez des patients à la suite d’un entraînement à base de pratiques de base du yoga (Ujjayin, Bhâstrika, Uddyana-bandha). Autant dire que les applications au niveau des sportifs sont…. très étendues.

    Dans le cadre d’une pratique sportive, l’une des difficultés est de savoir ce qui est pertinent et quand. En effet, dans cette forêt de techniques, si l’on n’est pas suffisamment aguerri il est aisé de s’y perdre. Pour éviter cet écueil, nombreux sont les sportifs qui se contentent de faire appel aux techniques posturales et de relaxation. Bien entendu, un professeur qualifié, vous guidera dans les choix à faire pour atteindre vos objectifs et développer les qualités nécessaires pour découvrir l’« athlète intérieur » qui sommeille en chacun d’entre vous.

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    2. La condition physique : assouplissements, étirements, renforcement

    La pratique du yoga est réputée pour ses nombreuses postures. En complément de la pratique d’un sport, certains groupes musculaires sont délaissés. En effet, chaque sport a sa spécificité et sollicitera plus ou moins certaines parties du corps.

    Le yoga s’inscrit ici comme une discipline qui réactivera les zones les moins sollicitées. Cela a pour intérêt d’éviter les déséquilibres notamment dans les sports asymétriques comme le tennis. Elle permet, par exemple, d’agir sur trois points fondamentaux : la souplesse, la capacité de contraction/étirement et le renforcement musculaire.

    • La souplesse

    Elle est essentielle pour un sportif. A haut-niveau, elle constitue notamment un véritable gage de prévention des risques de blessures. Le yoga intervient efficacement sur l’ensemble du système ostéo-articulaire permettant ainsi de limiter de façon significative les conséquences négatives dues aux sollicitations du sport intensif.

    Entretenir  une souplesse convenable contribue à une plus grande prise de plaisir, un meilleur contact avec les sensations. Il ne s’agit pas d’une recherche de performance de qui parviendra à être le plus laxe possible. L’intervention s’effectue dans la justesse réclamée par chaque sport. Une souplesse excessive n’a aucun intérêt. L’amélioration de ce paramètre est une conséquence de la pratique mais ne constitue pas un axe de travail à part entière sauf en cas de travail spécifique.

    • Les étirements

    Dans la continuité, nous trouvons les étirements et les contractions. Comme pour la souplesse, il s’agit ici d’avoir une action préventive. Un corps dont on prend soin par les étirements et les contractions est un corps qui subit moins les affres du quotidien, qui plus est d’un entrainement intensif.

    La récupération est accélérée. Les réflexes de détentes sont exercés et automatisés. Le yoga permet ainsi un travail, plus ou moins en douceur, de connaissance du corps au travers des postures (âsanas) proposées.

    En fonction des yogas, la proposition insiste plus ou moins sur la perfection de l’âsana ou sur d’autres aspects. Les objectifs sont sensiblement différents. Les différentes approches conviennent en fonction de la personnalité de chaque sportif.

    • Le renforcement musculaire

    Un véritable travail de force et d’endurance existe dans le yoga. Celui-ci est bénéfique car il renforce le corps de l’athlète ou du sportif amateur.  Il permet aussi de développer ces qualités d’endurance et de force au niveau mental.

    On retrouve un travail global : corps/esprit nécessaire à l’optimisation et à la rigueur de l’esprit d’un compétiteur digne de ce nom.

    Ces trois aptitudes : souplesse/étirement/renforcement sont les axes les plus utilisés. Mais comme nous l’avons vu, il est possible d’explorer de nombreuses autres dimensions.

    3.Vitalité et énergie

    Dans la théorie du yoga, avoir une vitalité de qualité est indispensable. Là encore, nous retrouvons un point commun avec le sport intensif. Une bonne vitalité c’est-à-dire un niveau d’énergie convenable est la clef de la motivation et de la confiance en soi. Malgré cela, dans les faits, lors des entraînements, peu de considération est apportée à cet aspect. Cela s’explique par le fait que peu de disciplines proposent du concret en la matière. Des explications théoriques se trouvent facilement, mais peu de véritables pratiques au sein d’un tout cohérent. Des techniques pour des actions ponctuelles (PNL, routines, du standard etc…) mais pas grand-chose sur comment faire pour que ça fonctionne pour soi. Personnellement, il n’y a que dans le yoga que je l’ai rencontré de façon aussi aboutie.

    Nous trouvons ici des techniques de souffles « prânâyâma », d’énergie « mudrâ/bandha », oculaires « drishti ». De quoi s’agit-il ?

    • Les souffles

    La respiration est le support clé de ces techniques. Elles fonctionnent selon 2 modalités : la respiration classique ou pneumatique qui consiste à fonctionner avec un maximum d’air la plupart du temps pour un rendement modeste. Le yoga parle d’une respiration plus subtile, c’est-à-dire qui nécessite moins d’air pour un rendement meilleur. C’est tout l’art du « Prânâyâma ».

    Il consiste en un apprentissage progressif d’un usage juste de la respiration. Au fil de la pratique, nous découvrons une nouvelle façon de respirer : des rythmes, une conscience du souffle. C’est ainsi que se développe assez vite une vitalité pour beaucoup insoupçonnée qui permettra de surmonter de nombreux moments difficiles grâce au maintien d’un enthousiasme et d’une motivation à toute épreuve.

    Le comportement du souffle est souvent comparé à celui d’un cheval fou au galop. Apprendre sa maîtrise, c’est bénéficier d’un surcroît d’énergie conséquent.

    L’application régulière de techniques de ce type assure de bonnes bases pour tout sportif.

    • Gestes et contractions

    Les « mudrâ et bandha » s’appliquent de 2 façons. Ils accompagnent les pratiques. Ainsi, ces techniques complètent les autres. Elles sont appliquées, dans ce cas, de façon plus superficielle.

    Dans un autre registre, il est possible de les approfondir en tant que pratiques à part entière. On recherche alors à potentialiser la vitalité activée dans les souffles.

    Dans le yoga, le corps est souvent imagé comme une jarre dans laquelle se déverse la vitalité. Le problème c’est que la jarre est percée. Les gestes et contractions servent dans un premier temps à rendre la jarre étanche. Ensuite, il s’agit de permettre à l’énergie des souffles de ne pas être dissipée n’importe comment. Pour un sportif, cela revient à bénéficier d’un bon niveau d’énergie dans les moments où il en a le plus besoin.

    • Les techniques oculaires

    Parfois appelé yoga des yeux, les « drishtis » sont des techniques du même ordre que les précédentes. Il s’agit de viser une meilleure maitrise de la vitalité et du mental. Elles entretiennent un lien étroit avec le fonctionnement des pensées par une perception plus juste.

    Il est évident que la perception visuelle est centrale dans la compétition. Mais, celle-ci est considérablement parasitée par l’activité mentale automatique. Portez attention au regard des champions : est-il fixe ou papillonne-t-il dans tous les sens ?

    Ces techniques ont pour but l’apaisement et la concentration, complétant ainsi les techniques précédentes. L’ensemble posture/souffles/gestes/yeux forme un préalable à ma façon de concevoir l’« entrainement mental ».

    En route vers les performances !

    4. Concentration et méditation

    • Concentration (Dharâna)

    Ces techniques fonctionnent par l’effort, par le maintien acéré d’une concentration rendue possible par la vitalité/énergie précédemment acquise. En effet, elle permet une plus grande intensité de concentration et un maintien plus facile dans le temps.

    Pour la compétition, l’apprentissage dépendra de chaque sport. En effet, certains sports nécessitent une forte concentration sur un temps court (tir à l’arc, golf), d’autres une concentration plus légère mais maintenue beaucoup plus longtemps (course à pied, cyclisme), d’autres encore alternent en fonction des moments (tennis, foot). L’art de « Dharâna » réconcilie immobilité et dynamisme.

    Le yoga offre un panel de possibilité large pour chacun des objectifs visés. Il faut donc bien connaitre les techniques employées pour les inscrire dans une pratique adaptée au sport et au sportif.

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    • Méditation (Dhyâna)

    La méditation est parfois utilisée dans le sport mais pas telle qu’elle est entendue dans le yoga. En effet, l’application consiste en un ensemble de techniques qui, dans le yoga, correspondent davantage à d’autres techniques « yoga-nidra », le yoga du sommeil ou de la relaxation.

    « Dhyâna » correspond, en revanche, à un état méditatif qui semble difficilement adaptable à une pratique en mouvement. Dans le cadre de préparation, il peut être intéressant de les expérimenter pour leurs apports généraux. Mais pour la pratique sportive, l’intérêt est limité voire, chez certains sportifs, contre-productif. En effet, pratiquer régulièrement, pourrait être amener à développer un état apathique, manquant de vigueur, « oubliant » ainsi de développer un tempérament de guerrier, d’athlète intérieur.

    Bien sûr, il est tout à fait possible de méditer régulièrement en conservant ce tempérament mais cela demande quelques précautions. Il convient donc de concevoir un programme adapté.

     

    5. L’aventure de « l’athlète intérieur»

     Le yoga permet bien plus qu’une simple préparation mentale ou un accessoire à la performance. C’est un corpus composé d’énormément de techniques conçues et perfectionnées au fil des âges pour correspondre à des applications pratiques dans le champ de l’accès à la spiritualité. Sans aller jusqu’à cette dernière, si j’ai pris l’image de Dan Millman et de son « athlète intérieur » c’est parce qu’il s’agit de cela. Le héros de ce roman se découvre en suivant un parcours initiatique de connaissance de soi par l’expérience.

    Il existe des tas de yogas différents : Nâthâ (celui que je pratique) Iyengar, Ashtanga, Kundalini, Hâtha, etc… Certains sont statiques, d’autres dynamiques, d’autres mixtes.

    Il convient d’évaluer les techniques à employer en fonction de plusieurs paramètres : la personnalité, les aptitudes physiques, de souffles, les facultés de concentration, la capacité de visualisation etc… Tout un programme résolument passionnant !

    6. Avantages et inconvénients

    Dans le yoga, tout est une question d’équilibre. J’ai plusieurs fois employé le terme d’ « art ». C’est le terme qui me semble le plus proche de la réalité. Il n’y a aucun inconvénient en soi à l’association yoga/performance sportive. Cependant, certaines techniques appliquées sans discernement se verront sans effet intéressant pour un compétiteur voire contraire aux objectifs.

    Il faut savoir évaluer la personnalité de chacun, on l’a déjà vu. Mais au-delà de cela, le sportif évolue dans le temps. Ainsi des techniques pertinentes un temps ne le seront pas nécessairement tout le temps. Un travail sur le souffle et la posture est souvent un point de départ. Les pratiques deviennent plus élaborées progressivement. En fonction des expériences de vie et des compétitions, les séances sont adaptées. Ceci se pratique en collectif en suivant le profil du groupe et l’évolution de celui-ci.

    Le yoga se pratique en gardant à l’esprit des « impératifs » méthodologiques, mais avec une grande souplesse et une capacité d’adaptation certaine… Finalement, c’est ce qu’on demande à un sportif de haut-niveau : rigueur, travail, intensité mais aussi souplesse, lâcher-prise et performance.

    Passées les précautions ci-dessus, le yoga permet d’acquérir une connaissance de soi profonde issue de sa propre expérience et non d’une théorie. Aussi pertinente soit elle, aucune théorie ne permet de saisir l’essence même de l’être humain et de ses expériences de vie. Progressivement, cette connaissance s’invite dans les compétitions qui bénéficient d’un surcroît d’énergie, d’une concentration bien plus stable et fidèle, d’un équilibre émotionnel plus grand. Il s’agit donc à la fois d’un outil d’optimisation pour un sportif, en plus de prévenir des nombreux risques de blessures… physiques comme psychologiques.

    7. Développer des qualités

    Force, endurance, équilibre, concentration, verticalité, puissance, plaisir, joie, stabilité, combativité, compétitivité, goût du surpassement, connaissance sont autant d’exemple de qualité que l’on développe par une pratique assidue du yoga.

    La particularité est la manière de les créer et/ou les développer, les entretenir. On agit sur les qualités d’une façon différente par chaque technique. On apprend ainsi à diriger ses ressources vers un objectif unique, ce qui est un apprentissage grandement utile à la compétition. On apprend par la découverte et par des voies différentes.

    Un exemple : comment développer les qualités « puissance et volonté » :

    • Par le souffle nous ferons appel à une pratique dynamisante comme la respiration solaire.
    • Par la posture du cobra, on renforcera dos et abdos. Cette posture permet d’expérimenter un état d’esprit spécifique en l’installant naturellement. Elle exerce la capacité à faire-face à une situation comme le cobra toise son ennemi. Il mobilise ensuite ses ressources et se jette ainsi à 100% dans l’attaque.

    Par la pratique de l’aigle qui consiste en la visualisation d’un scénario calqué sur le comportement de ce rapace dont les qualités de volonté et de puissance ne sont pas à remettre en cause.

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                    Un exemple de posture de l’aigle

     

    Voici un très bref aperçu d’une façon de faire. Ceci est déclinable avec chaque « type » de technique vu plus haut. L’efficacité du yoga vient en partie de ce fonctionnement. Il permet de décortiquer chaque aspect des qualités, d’en appréhender chaque petite parcelle par l’expérience et pas seulement par l’intellect. La pratique du yoga unifie tous ces aspects d’une même dimension. C’est par la découverte que l’on procède et non par un apprentissage conditionné. Selon l’adage, confirmé par les sciences de l’apprentissage : ce qui est découvert par l’expérience se retient mieux que ce qui est appris mécaniquement. C’est, la plupart du temps, la démarche inverse que l’on rencontre dans l’enseignement technique. D’où la complémentarité yoga/sport.

     

    8. En pratique

    Les apports du yoga se diffusent par la régularité, c’est donc par là qu’il faut envisager la mise en place d’un programme. Il ne s’agit pas de pratiquer 3 heures par jour, même si on en a les capacités physiques. Cela ne sert pas à grand-chose. Il faudra accepter de prendre du temps, de consacrer pleinement à cette activité. C’est ainsi qu’en simplement 1h de cours hebdomadaire, les effets recherchés commenceront à se faire sentir dès le premier mois. Les deux aspects importants sont les enseignements et la pratique personnelle.

     

    • Les enseignements

    Le yoga ne s’apprend pas seul. Bien que l’on trouve des flots de vidéos qui fleurissent le paysage d’internet, c’est une pratique trop complexe pour ne pas être guidé par un professionnel. L’enseignant vous donnera les bases indispensables à une bonne pratique. Dans le cadre d’une complémentarité avec une discipline sportive, le professeur orientera certaines techniques, en choisira certaines plus que d’autres. Le but est qu’elles soient adaptées à votre projet.

    Il convient de respecter le projet du sportif d’une part et les enseignements d’autre part. Ces derniers sont transmis selon une méthode précise, c’est ce qui en garantit la qualité et l’efficacité. Le projet du sportif tient une place centrale, évidemment. Comme nous l’avons vu plus haut, il ne s’agit pas de développer des aspects contradictoires à la performance. L’objectif d’un compétiteur est de gagner. Les perspectives de lâcher-prise, de relaxation, de méditation sont envisagées au regard de celui-ci.

    Des techniques de yoga sont parfois utilisées par des acteurs non professionnels du yoga, c’est même assez fréquent. Bien entendu, on n’en attendra pas la même qualité qu’un enseignant diplômé qui pratique quotidiennement depuis plusieurs années. D’autant plus dans le milieu sportif, car la compétition entraîne beaucoup plus de mélanges émotionnels en tout genre et rend difficile la prise de recul, savoir comment travailler et pourquoi.

     

    • La pratique personnelle

    Elle est garante de l’efficience des enseignements. Comme pour tout, l’efficacité provient en grande partie de la répétition.

    Concrètement, tout dépend du temps dont vous disposez et surtout que vous souhaitez y consacrer. Il est important de réactiver régulièrement ce qui est travaillé.

    Tous les jours, on peut pratiquer 15min/30min, 2 ou 3 techniques, et on change chaque jour. Quand on peut, il peut être bien de faire des séances d’1h de son côté, tous les 2 ou 3 jours. Ça apporte une expérience plus complète, une connaissance plus profonde.

    Quoiqu’il en soit, cette pratique personnelle est indispensable car elle permet de créer un cadre individuel, rigoureux mais pas rigide. Il s’agit de créer une autodiscipline, de développer une rigueur personnelle indispensable dans une pratique sérieuse du sport comme dans la vie.

    D’une façon générale, une séance classique dure environ 1h. Si vous avez déjà une expérience du yoga vous pouvez condenser les enseignements. Par exemple, il est possible de réaliser un stage intensif  et pratiquer par vous-même jusqu’à recevoir d’autres enseignements. Sinon, une séance ou deux par semaine est un bon rythme. Il permet d’être guidé, ni trop, ni trop peu.

    L’autonomie et l’expérience propre est ce qui prime dans le yoga. L’intimité de l’expérience personnelle doit devenir la part la plus importante. La relation à l’enseignant et aux enseignements l’est également, mais d’une autre manière.

     

    9. Conclusion

    Pour finir ce bref exposé, le yoga intervient comme un catalyseur et un moyen d’exprimer de nouvelles choses. Sa pratique permet au sportif d’acquérir une profonde connaissance de son corps, de ses émotions, et de son mental. Concrètement, cela lui permet d’accumuler des sensations beaucoup plus précises et nombreuses. Ceci constitue un point essentiel dans les apprentissages et corrections techniques dans son sport propre. Le yoga est donc un partenaire très intéressant qui peut offrir de nouvelles pistes de travail.

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    Mathieu CHARON