• Le Yoga : du sportif à l'athlète intérieur

    Le Yoga fait son grand retour dans les pratiques sportives ces temps-ci surtout sur l’angle de l’optimisation de la condition physique. C’est le premier point que j’aborderai. Mais le yoga, ce n’est pas seulement ça. Sensible à cet exercice, les sportifs se dirigent beaucoup vers des yogas dits « posturaux » c’est-à-dire qui insistent surtout sur la position du corps, l’alignement des articulations, des lignes de forces. Ces yogas sont souvent dynamiques, l’attrait est donc naturel pour des sportifs.

    Cependant, bien que ce soit un point intéressant,  est-ce vraiment le plus intéressant pour un compétiteur à haut niveau ? La réponse ne saurait être simple. Le yoga aime les paradoxes, la compétition aussi.

    yoga, préparation mentale, athlète intérieur

    Comme souvent, c’est par la voie de l’entretien du corps que l’on appréhende le yoga, puis, le temps passe et on découvre d’autres pratiques souvent plus statiques, du moins en apparence. On part alors à l’aventure de techniques aux noms tous plus exotiques les uns que les autres : « prânâyâma », « mudrâ/bandha », « mantra », « dharâna », « drishti », « dhyâna ». Des traductions ont été proposées pour chacun d’entre eux, respectivement souffles, gestes/contractions, son, concentration, techniques oculaires et méditation. Cependant, elles n’ont qu’un intérêt relatif car elles ne permettent pas de saisir l’ensemble des aspects de chaque pratique, elles n’en offrent qu’un pâle résumé… utile néanmoins sur un plan pédagogique.

    J’aborderai donc ce que l’on recherche au travers de ces pratiques millénaires et surtout ce que l’on vise avec des sportifs. Se découvrir « athlète intérieur », comme dirait Dan Millman, est le chemin auquel invite le yoga. Je vous propose aujourd’hui d’esquisser quelques  potentialités dévoilées par ce véritable laboratoire intérieur.

    1. Préalables : de l’expérience à la science

    Le yoga est une pratique ou plutôt une méthode qui regroupe un très grand nombre de techniques transmises depuis des centaines et des centaines d’années. Sa particularité est d’être une discipline qui s’expérimente. Aucun dogme, aucun chemin préétabli, seulement une multitude de procédés à expérimenter. A chacun d’en tirer ses conclusions quant aux effets et à l’efficacité. En général, on retrouve les mêmes effets en appliquant les mêmes techniques. Les mêmes causes entraînant les mêmes conséquences.

    De ce point de vue, on pourrait dire que c’est une discipline scientifique, bien que les yogis ne revendiquent aucunement un tel statut. Les techniques sont expérimentées et reproduites des milliers de fois, dans des conditions identiques et différentes qui induisent des effets similaires au travers des temps. Rares sont les disciplines qui peuvent revendiquer un tel patrimoine, un aussi grand nombre de reproductions, une telle rigueur depuis si longtemps.

    Aujourd’hui, le développement de l’imagerie médicale offre un nouveau regard sur cette méthode dévoilant à sa façon, des effets expérimentés depuis des siècles. La pleine conscience, bien que concept bouddhiste, a bénéficié des apports techniques du yoga (body-scan, visualisations, postures) dont les pratiques méditatives bien antérieures ont largement inspiré celui-ci. Les articles scientifiques sur ces techniques foisonnent dans la littérature scientifique ces temps-ci.

    Dans un autre registre, pour l’obtention de son doctorat en physiologie, Florence Villien a montré des effets significatifs d’augmentation de la capacité respiratoire et de diminution de la fréquence cardiaque chez des patients à la suite d’un entraînement à base de pratiques de base du yoga (Ujjayin, Bhâstrika, Uddyana-bandha). Autant dire que les applications au niveau des sportifs sont…. très étendues.

    Dans le cadre d’une pratique sportive, l’une des difficultés est de savoir ce qui est pertinent et quand. En effet, dans cette forêt de techniques, si l’on n’est pas suffisamment aguerri il est aisé de s’y perdre. Pour éviter cet écueil, nombreux sont les sportifs qui se contentent de faire appel aux techniques posturales et de relaxation. Bien entendu, un professeur qualifié, vous guidera dans les choix à faire pour atteindre vos objectifs et développer les qualités nécessaires pour découvrir l’« athlète intérieur » qui sommeille en chacun d’entre vous.

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    2. La condition physique : assouplissements, étirements, renforcement

    La pratique du yoga est réputée pour ses nombreuses postures. En complément de la pratique d’un sport, certains groupes musculaires sont délaissés. En effet, chaque sport a sa spécificité et sollicitera plus ou moins certaines parties du corps.

    Le yoga s’inscrit ici comme une discipline qui réactivera les zones les moins sollicitées. Cela a pour intérêt d’éviter les déséquilibres notamment dans les sports asymétriques comme le tennis. Elle permet, par exemple, d’agir sur trois points fondamentaux : la souplesse, la capacité de contraction/étirement et le renforcement musculaire.

    • La souplesse

    Elle est essentielle pour un sportif. A haut-niveau, elle constitue notamment un véritable gage de prévention des risques de blessures. Le yoga intervient efficacement sur l’ensemble du système ostéo-articulaire permettant ainsi de limiter de façon significative les conséquences négatives dues aux sollicitations du sport intensif.

    Entretenir  une souplesse convenable contribue à une plus grande prise de plaisir, un meilleur contact avec les sensations. Il ne s’agit pas d’une recherche de performance de qui parviendra à être le plus laxe possible. L’intervention s’effectue dans la justesse réclamée par chaque sport. Une souplesse excessive n’a aucun intérêt. L’amélioration de ce paramètre est une conséquence de la pratique mais ne constitue pas un axe de travail à part entière sauf en cas de travail spécifique.

    • Les étirements

    Dans la continuité, nous trouvons les étirements et les contractions. Comme pour la souplesse, il s’agit ici d’avoir une action préventive. Un corps dont on prend soin par les étirements et les contractions est un corps qui subit moins les affres du quotidien, qui plus est d’un entrainement intensif.

    La récupération est accélérée. Les réflexes de détentes sont exercés et automatisés. Le yoga permet ainsi un travail, plus ou moins en douceur, de connaissance du corps au travers des postures (âsanas) proposées.

    En fonction des yogas, la proposition insiste plus ou moins sur la perfection de l’âsana ou sur d’autres aspects. Les objectifs sont sensiblement différents. Les différentes approches conviennent en fonction de la personnalité de chaque sportif.

    • Le renforcement musculaire

    Un véritable travail de force et d’endurance existe dans le yoga. Celui-ci est bénéfique car il renforce le corps de l’athlète ou du sportif amateur.  Il permet aussi de développer ces qualités d’endurance et de force au niveau mental.

    On retrouve un travail global : corps/esprit nécessaire à l’optimisation et à la rigueur de l’esprit d’un compétiteur digne de ce nom.

    Ces trois aptitudes : souplesse/étirement/renforcement sont les axes les plus utilisés. Mais comme nous l’avons vu, il est possible d’explorer de nombreuses autres dimensions.

    3.Vitalité et énergie

    Dans la théorie du yoga, avoir une vitalité de qualité est indispensable. Là encore, nous retrouvons un point commun avec le sport intensif. Une bonne vitalité c’est-à-dire un niveau d’énergie convenable est la clef de la motivation et de la confiance en soi. Malgré cela, dans les faits, lors des entraînements, peu de considération est apportée à cet aspect. Cela s’explique par le fait que peu de disciplines proposent du concret en la matière. Des explications théoriques se trouvent facilement, mais peu de véritables pratiques au sein d’un tout cohérent. Des techniques pour des actions ponctuelles (PNL, routines, du standard etc…) mais pas grand-chose sur comment faire pour que ça fonctionne pour soi. Personnellement, il n’y a que dans le yoga que je l’ai rencontré de façon aussi aboutie.

    Nous trouvons ici des techniques de souffles « prânâyâma », d’énergie « mudrâ/bandha », oculaires « drishti ». De quoi s’agit-il ?

    • Les souffles

    La respiration est le support clé de ces techniques. Elles fonctionnent selon 2 modalités : la respiration classique ou pneumatique qui consiste à fonctionner avec un maximum d’air la plupart du temps pour un rendement modeste. Le yoga parle d’une respiration plus subtile, c’est-à-dire qui nécessite moins d’air pour un rendement meilleur. C’est tout l’art du « Prânâyâma ».

    Il consiste en un apprentissage progressif d’un usage juste de la respiration. Au fil de la pratique, nous découvrons une nouvelle façon de respirer : des rythmes, une conscience du souffle. C’est ainsi que se développe assez vite une vitalité pour beaucoup insoupçonnée qui permettra de surmonter de nombreux moments difficiles grâce au maintien d’un enthousiasme et d’une motivation à toute épreuve.

    Le comportement du souffle est souvent comparé à celui d’un cheval fou au galop. Apprendre sa maîtrise, c’est bénéficier d’un surcroît d’énergie conséquent.

    L’application régulière de techniques de ce type assure de bonnes bases pour tout sportif.

    • Gestes et contractions

    Les « mudrâ et bandha » s’appliquent de 2 façons. Ils accompagnent les pratiques. Ainsi, ces techniques complètent les autres. Elles sont appliquées, dans ce cas, de façon plus superficielle.

    Dans un autre registre, il est possible de les approfondir en tant que pratiques à part entière. On recherche alors à potentialiser la vitalité activée dans les souffles.

    Dans le yoga, le corps est souvent imagé comme une jarre dans laquelle se déverse la vitalité. Le problème c’est que la jarre est percée. Les gestes et contractions servent dans un premier temps à rendre la jarre étanche. Ensuite, il s’agit de permettre à l’énergie des souffles de ne pas être dissipée n’importe comment. Pour un sportif, cela revient à bénéficier d’un bon niveau d’énergie dans les moments où il en a le plus besoin.

    • Les techniques oculaires

    Parfois appelé yoga des yeux, les « drishtis » sont des techniques du même ordre que les précédentes. Il s’agit de viser une meilleure maitrise de la vitalité et du mental. Elles entretiennent un lien étroit avec le fonctionnement des pensées par une perception plus juste.

    Il est évident que la perception visuelle est centrale dans la compétition. Mais, celle-ci est considérablement parasitée par l’activité mentale automatique. Portez attention au regard des champions : est-il fixe ou papillonne-t-il dans tous les sens ?

    Ces techniques ont pour but l’apaisement et la concentration, complétant ainsi les techniques précédentes. L’ensemble posture/souffles/gestes/yeux forme un préalable à ma façon de concevoir l’« entrainement mental ».

    En route vers les performances !

    4. Concentration et méditation

    • Concentration (Dharâna)

    Ces techniques fonctionnent par l’effort, par le maintien acéré d’une concentration rendue possible par la vitalité/énergie précédemment acquise. En effet, elle permet une plus grande intensité de concentration et un maintien plus facile dans le temps.

    Pour la compétition, l’apprentissage dépendra de chaque sport. En effet, certains sports nécessitent une forte concentration sur un temps court (tir à l’arc, golf), d’autres une concentration plus légère mais maintenue beaucoup plus longtemps (course à pied, cyclisme), d’autres encore alternent en fonction des moments (tennis, foot). L’art de « Dharâna » réconcilie immobilité et dynamisme.

    Le yoga offre un panel de possibilité large pour chacun des objectifs visés. Il faut donc bien connaitre les techniques employées pour les inscrire dans une pratique adaptée au sport et au sportif.

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    • Méditation (Dhyâna)

    La méditation est parfois utilisée dans le sport mais pas telle qu’elle est entendue dans le yoga. En effet, l’application consiste en un ensemble de techniques qui, dans le yoga, correspondent davantage à d’autres techniques « yoga-nidra », le yoga du sommeil ou de la relaxation.

    « Dhyâna » correspond, en revanche, à un état méditatif qui semble difficilement adaptable à une pratique en mouvement. Dans le cadre de préparation, il peut être intéressant de les expérimenter pour leurs apports généraux. Mais pour la pratique sportive, l’intérêt est limité voire, chez certains sportifs, contre-productif. En effet, pratiquer régulièrement, pourrait être amener à développer un état apathique, manquant de vigueur, « oubliant » ainsi de développer un tempérament de guerrier, d’athlète intérieur.

    Bien sûr, il est tout à fait possible de méditer régulièrement en conservant ce tempérament mais cela demande quelques précautions. Il convient donc de concevoir un programme adapté.

     

    5. L’aventure de « l’athlète intérieur»

     Le yoga permet bien plus qu’une simple préparation mentale ou un accessoire à la performance. C’est un corpus composé d’énormément de techniques conçues et perfectionnées au fil des âges pour correspondre à des applications pratiques dans le champ de l’accès à la spiritualité. Sans aller jusqu’à cette dernière, si j’ai pris l’image de Dan Millman et de son « athlète intérieur » c’est parce qu’il s’agit de cela. Le héros de ce roman se découvre en suivant un parcours initiatique de connaissance de soi par l’expérience.

    Il existe des tas de yogas différents : Nâthâ (celui que je pratique) Iyengar, Ashtanga, Kundalini, Hâtha, etc… Certains sont statiques, d’autres dynamiques, d’autres mixtes.

    Il convient d’évaluer les techniques à employer en fonction de plusieurs paramètres : la personnalité, les aptitudes physiques, de souffles, les facultés de concentration, la capacité de visualisation etc… Tout un programme résolument passionnant !

    6. Avantages et inconvénients

    Dans le yoga, tout est une question d’équilibre. J’ai plusieurs fois employé le terme d’ « art ». C’est le terme qui me semble le plus proche de la réalité. Il n’y a aucun inconvénient en soi à l’association yoga/performance sportive. Cependant, certaines techniques appliquées sans discernement se verront sans effet intéressant pour un compétiteur voire contraire aux objectifs.

    Il faut savoir évaluer la personnalité de chacun, on l’a déjà vu. Mais au-delà de cela, le sportif évolue dans le temps. Ainsi des techniques pertinentes un temps ne le seront pas nécessairement tout le temps. Un travail sur le souffle et la posture est souvent un point de départ. Les pratiques deviennent plus élaborées progressivement. En fonction des expériences de vie et des compétitions, les séances sont adaptées. Ceci se pratique en collectif en suivant le profil du groupe et l’évolution de celui-ci.

    Le yoga se pratique en gardant à l’esprit des « impératifs » méthodologiques, mais avec une grande souplesse et une capacité d’adaptation certaine… Finalement, c’est ce qu’on demande à un sportif de haut-niveau : rigueur, travail, intensité mais aussi souplesse, lâcher-prise et performance.

    Passées les précautions ci-dessus, le yoga permet d’acquérir une connaissance de soi profonde issue de sa propre expérience et non d’une théorie. Aussi pertinente soit elle, aucune théorie ne permet de saisir l’essence même de l’être humain et de ses expériences de vie. Progressivement, cette connaissance s’invite dans les compétitions qui bénéficient d’un surcroît d’énergie, d’une concentration bien plus stable et fidèle, d’un équilibre émotionnel plus grand. Il s’agit donc à la fois d’un outil d’optimisation pour un sportif, en plus de prévenir des nombreux risques de blessures… physiques comme psychologiques.

    7. Développer des qualités

    Force, endurance, équilibre, concentration, verticalité, puissance, plaisir, joie, stabilité, combativité, compétitivité, goût du surpassement, connaissance sont autant d’exemple de qualité que l’on développe par une pratique assidue du yoga.

    La particularité est la manière de les créer et/ou les développer, les entretenir. On agit sur les qualités d’une façon différente par chaque technique. On apprend ainsi à diriger ses ressources vers un objectif unique, ce qui est un apprentissage grandement utile à la compétition. On apprend par la découverte et par des voies différentes.

    Un exemple : comment développer les qualités « puissance et volonté » :

    • Par le souffle nous ferons appel à une pratique dynamisante comme la respiration solaire.
    • Par la posture du cobra, on renforcera dos et abdos. Cette posture permet d’expérimenter un état d’esprit spécifique en l’installant naturellement. Elle exerce la capacité à faire-face à une situation comme le cobra toise son ennemi. Il mobilise ensuite ses ressources et se jette ainsi à 100% dans l’attaque.

    Par la pratique de l’aigle qui consiste en la visualisation d’un scénario calqué sur le comportement de ce rapace dont les qualités de volonté et de puissance ne sont pas à remettre en cause.

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                    Un exemple de posture de l’aigle

     

    Voici un très bref aperçu d’une façon de faire. Ceci est déclinable avec chaque « type » de technique vu plus haut. L’efficacité du yoga vient en partie de ce fonctionnement. Il permet de décortiquer chaque aspect des qualités, d’en appréhender chaque petite parcelle par l’expérience et pas seulement par l’intellect. La pratique du yoga unifie tous ces aspects d’une même dimension. C’est par la découverte que l’on procède et non par un apprentissage conditionné. Selon l’adage, confirmé par les sciences de l’apprentissage : ce qui est découvert par l’expérience se retient mieux que ce qui est appris mécaniquement. C’est, la plupart du temps, la démarche inverse que l’on rencontre dans l’enseignement technique. D’où la complémentarité yoga/sport.

     

    8. En pratique

    Les apports du yoga se diffusent par la régularité, c’est donc par là qu’il faut envisager la mise en place d’un programme. Il ne s’agit pas de pratiquer 3 heures par jour, même si on en a les capacités physiques. Cela ne sert pas à grand-chose. Il faudra accepter de prendre du temps, de consacrer pleinement à cette activité. C’est ainsi qu’en simplement 1h de cours hebdomadaire, les effets recherchés commenceront à se faire sentir dès le premier mois. Les deux aspects importants sont les enseignements et la pratique personnelle.

     

    • Les enseignements

    Le yoga ne s’apprend pas seul. Bien que l’on trouve des flots de vidéos qui fleurissent le paysage d’internet, c’est une pratique trop complexe pour ne pas être guidé par un professionnel. L’enseignant vous donnera les bases indispensables à une bonne pratique. Dans le cadre d’une complémentarité avec une discipline sportive, le professeur orientera certaines techniques, en choisira certaines plus que d’autres. Le but est qu’elles soient adaptées à votre projet.

    Il convient de respecter le projet du sportif d’une part et les enseignements d’autre part. Ces derniers sont transmis selon une méthode précise, c’est ce qui en garantit la qualité et l’efficacité. Le projet du sportif tient une place centrale, évidemment. Comme nous l’avons vu plus haut, il ne s’agit pas de développer des aspects contradictoires à la performance. L’objectif d’un compétiteur est de gagner. Les perspectives de lâcher-prise, de relaxation, de méditation sont envisagées au regard de celui-ci.

    Des techniques de yoga sont parfois utilisées par des acteurs non professionnels du yoga, c’est même assez fréquent. Bien entendu, on n’en attendra pas la même qualité qu’un enseignant diplômé qui pratique quotidiennement depuis plusieurs années. D’autant plus dans le milieu sportif, car la compétition entraîne beaucoup plus de mélanges émotionnels en tout genre et rend difficile la prise de recul, savoir comment travailler et pourquoi.

     

    • La pratique personnelle

    Elle est garante de l’efficience des enseignements. Comme pour tout, l’efficacité provient en grande partie de la répétition.

    Concrètement, tout dépend du temps dont vous disposez et surtout que vous souhaitez y consacrer. Il est important de réactiver régulièrement ce qui est travaillé.

    Tous les jours, on peut pratiquer 15min/30min, 2 ou 3 techniques, et on change chaque jour. Quand on peut, il peut être bien de faire des séances d’1h de son côté, tous les 2 ou 3 jours. Ça apporte une expérience plus complète, une connaissance plus profonde.

    Quoiqu’il en soit, cette pratique personnelle est indispensable car elle permet de créer un cadre individuel, rigoureux mais pas rigide. Il s’agit de créer une autodiscipline, de développer une rigueur personnelle indispensable dans une pratique sérieuse du sport comme dans la vie.

    D’une façon générale, une séance classique dure environ 1h. Si vous avez déjà une expérience du yoga vous pouvez condenser les enseignements. Par exemple, il est possible de réaliser un stage intensif  et pratiquer par vous-même jusqu’à recevoir d’autres enseignements. Sinon, une séance ou deux par semaine est un bon rythme. Il permet d’être guidé, ni trop, ni trop peu.

    L’autonomie et l’expérience propre est ce qui prime dans le yoga. L’intimité de l’expérience personnelle doit devenir la part la plus importante. La relation à l’enseignant et aux enseignements l’est également, mais d’une autre manière.

     

    9. Conclusion

    Pour finir ce bref exposé, le yoga intervient comme un catalyseur et un moyen d’exprimer de nouvelles choses. Sa pratique permet au sportif d’acquérir une profonde connaissance de son corps, de ses émotions, et de son mental. Concrètement, cela lui permet d’accumuler des sensations beaucoup plus précises et nombreuses. Ceci constitue un point essentiel dans les apprentissages et corrections techniques dans son sport propre. Le yoga est donc un partenaire très intéressant qui peut offrir de nouvelles pistes de travail.

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    Mathieu CHARON

  • Contrôle et prévision et prévision du stress : article 2/3

    Après avoir parlé de l’identification des situations stressantes, je traiterai de deux autres composantes qui modulent la réponse au stress : le contrôle et la capacité de prévision. Au fil de déroulé de l’article, je vous proposerai des petits exercices pour alimenter votre réflexion.

    contrôle et prévision du stress1. Savoir identifier les paramètres importants:

    • Les profils:

    Des types de personnalité ont pu être mis en évidence dans des travaux de recherche. Des professionnels travaillent avec, d’autres sans. Avoir une idée de sa personnalité donne des éléments clés sur notre façon de réagir. Même si cela reste de la probabilité et non une vérité absolue.

    Quoiqu’il en soit, cela permet d’initier une démarche autour du stress.

    • S’autoévaluer:

    Je vous propose de réaliser 4 fiches ; 1 pour chaque paramètre incontournable de la compétition sportive : le physique, la technique, la tactique, le mental. Il convient d’utiliser des termes qui vous parlent car c’est vous qui travaillerez sur cette base : la personnalisation est importante.

    Prenez 10 à 15 critères par fiches et effectuez une première évaluation. Je vous invite, une fois vos fiches remplies, à demander l’avis des professionnels qui vous entourent. Par exemple, vos enseignants. Ils vous permettront d’affiner les critères et de cibler l’important pour votre progression et d’éliminer le superficiel. Un regard extérieur, permettra également de revoir votre jugement sur votre pratique sportive. Il est fréquent de surestimer ou sous-estimer ses compétences.

    Concrètement, vous listez les critères, vous faites 2 colonnes : points forts/points faibles et vous cochez plus ou moins selon que vous estimez que c’est fort moyen ou faible.

    Cette évaluation vous délivrera de nombreuses informations qui vous serviront dans tous les compartiments. Vous progresserez ainsi dans tous les domaines au-delà de la seule gestion du stress.

    Exemple de fiche « mental » sur 10 critères :

    contrôle et prévision du stress

    Les critères sont à personnaliser. Les 3 autres fiches sont à concevoir sur le même modèle, pour les plans « condition physique », « technique » et « tactique ».

    • Les situations stressantes:

    Savoir les identifier contribue à limiter l’impact du stress négatif. Je développerai ce point plus bas dans la partie « capacité de prévision ».

    Abordons à présent les deux modulateurs suivants : la capacité de contrôle et de prévision.

    2. Modulateur 2 : la capacité de contrôle

    • Explication

    C’est un des leviers les plus efficaces pour gérer l’énergie émotionnelle. Optimiser cette capacité peut se faire de plusieurs façons.

    Pour reprendre, le fil de nos réflexions, revenons sur la connaissance des mécanismes du stress. Associée à une auto-évaluation la plus objective possible, elle va permettre de savoir quand le stress sera suffisant ou insuffisant et d’agir en conséquence.

    Au-delà de l’identification, qui accroitra vos capacités de contrôle en ayant une longueur d’avance sur vos émotions.  Le contrôle, c’est aussi savoir comment faire monter ou baisser le niveau de l’énergie émotionnelle.

    Avant d’aborder 2 expériences de base, sachez que le fait de savoir que vous pouvez agir sur l’intensité du stress vous rend moins réactif à celui-ci. Nous retrouvons en permanence le croisement entre connaissance et expérience. On parle de modifications de la réponse biologique au stress. La connaissance bien qu’intellectuelle agit concrètement sur l’organisme !

    Lors d’une compétition, le contrôle intervient sur 3 sphères :

    • Les « petits détails »: tout ce qui peut se régler à l’avance.  Ces petites choses qui vous rendent la vie plus simple : prévoir une casquette, de quoi s’alimenter et boire, la préparation et vérification du matériel, la prise en compte de l’environnement. Ces éléments ne sont pas directement impliqués dans la gestion du stress mais ils permettent d’être dans des conditions favorables. Ces choses sont parfois prises en compte par le coach, notamment dans les sports collectifs.
      Encore une fois, lister est une façon simple qui d’agir efficacement.
    • L’émotionnel : j’envisage ici les émotions comme un flux d’énergie. On peut influencer l’intensité de celui-ci et sa direction. L’énergie restera raisonnable, stimulante mais pas épuisante. Elle sera dirigée vers ce qui sert : notre technique sportive ou nos plans tactiques. On peut également la diriger sur des qualités : la combativité, la concentration, l’agressivité.
    • Les pensées: des façons de travailler, que je n’aborderai pas ici, existent : la concentration, les rituels, les routines, entre autres.

    Naturellement, les exercices influent sur les trois sphères. L’impact est favorable sur l’ensemble de notre capacité de contrôle, dans un travail global.

    • Pratique

    Je vous propose une double expérience pour agir sur la sphère émotionnelle. Il s’agit de faire augmenter ou diminuer le stress dans des conditions d’intensité modérée.

    • En cas d’hypostress : profitez des temps-morts pour effectuer cet exercice respiratoire : 3 inspirations brèves suivies d’une seule expiration brève, comme un soupir. Faites-le par série de 3 fois.
      Pas plus de trois fois, car l’hyperventilation entraînerait un lâcher-prise excessif qui nuirait à votre performance. C’est sur la répétition que l’on mise.
      Cet exercice vous permettra de gagner en dynamisme et en vivacité. Vous augmenterez le stress pour atteindre la zone de contrôle.
    • En cas d’hyperstress : la démarche inverse : 1 seule inspiration en 5 secondes puis 3 expirations, là encore comme trois soupirs prolongés sur 3 à 5 secondes chacun. 5s d’inspir / 15s d’expir.

    Même proportion : des séries de trois répétées lors des temps-morts ou moins actifs dont vous disposez.

    Ces deux exercices ne visent pas à agir fortement sur le stress, simplement à vous faire expérimenter que l’on peut agir sur lui simplement. L’objectif est modeste : tempérer un stress un peu trop haut ou un peu trop bas, ni plus ni moins.

    contrôle et prévision du stress

    3. Modulateur 3 : la capacité de prévision

    • Explication

    La réaction au stress est plus forte face à une situation inconnue. Par conséquent, préparez-vous. Sachez envisager les situations dans lesquelles le stress sera là. Votre réponse sera plus adaptée à la situation.

    La surprise et la nouveauté sont ce qu’il faut éviter le plus pour rester en contrôle. C’est le rôle du travail tactique. Faites le tour de ce qui peut se présenter durant votre compétition. Vous aurez moins de situations inédites. Votre attention se placera sur votre compétition, en zone de contrôle. Vous n’aurez pas à utiliser de stratégie d’ajustement face au stress. C’est un travail d’anticipation.

    Le simple fait de savoir que la situation sera stressante, rend l’impact du stress moins fort sur l’organisme. On pourrait penser que la connaissance n’intervient que sur le plan mental mais c’est plus complexe. Elle intervient également sur le physiologique. D’où l’importance d’une prise en compte d’ensemble.

    • En pratique

    On retrouve, bien entendu, le listing des situations potentiellement stressantes.  C’est un point fondamental. Exercez votre capacité d’anticipation, apprenez à prendre un temps d’avance sur vos émotions. Une situation fortement stressante pour quelqu’un peut être dérisoire pour quelqu’un d’autre. Recherchez ce qui est valable pour vous.

     

    En conclusion : j’aborderais un dernier point : l’entourage. Avoir autour de soi, des gens qui vous aident à être dans une démarche constructive et active intervient également sur la réponse au stress. Plus un sportif se sent soutenu, apprécié et reconnu pour ce qu’il est, meilleures seront ses chances d’être et rester en stress positif.

    Plus le niveau sportif est élevé, plus cette composante est cruciale. L’entourage devient la clé de voûte de la gestion émotionnelle. Je ne parle pas seulement ici de l’entourage technique, mais aussi…. Et peut-être même surtout, de ceux qui vous rappellent qu’il n’y a pas que le sport dans la vie, y compris à très haut niveau.

    Mathieu CHARON

    Les liens vers les deux articles précédents sur le thème :

    Le stress en compétition

    Les trois modulateurs du stress 1/3

  • Les trois modulateurs du stress : article 1/3

    Dans l’article intitulé le stress en compétition, j’ai présenté un modèle qui insiste sur les incidences biologiques du stress. Ici, nous verrons de ce qui module cette réponse de l’organisme. Nous ne sommes pas égaux face à lui. Quelles sont nos possibilités d’action ? Comment travailler concrètement ?

    Premièrement, nous reprendrons quelques éléments du syndrome général d’adaptation (SGA) défini par Sélyé (détaillé dans l’article précédent). Ensuite, nous adapterons ceci à la compétition sportive et verrons le premier des trois modulateurs de la réponse au stress. Enfin, je conclurai sur ce qu’apporte le travail avec un psychologue pour la gestion du stress.stress personnalité et mental

    Les trois phases du SGA :

    stress personnalité et mental

    Ce modèle a pour objet principal deux réponses (principalement) biologiques au stress :

    • La réponse du système immunitaire
    • La réponse du système endocrinien (hormonal)

    Il a été montré que le stress positif (phase 1 ou 2), est un stimulant des systèmes immunitaire et hormonal. En revanche, lorsque l’on passe en phase de résistance, on observe des conséquences négatives. Le système immunitaire devient plus fragile et le système hormonal subit des dérèglements. Il existe un lien important entre ce dernier et la gestion des émotions en général.

    En termes de compétition :

    Sur le plan de la performance sportive : nous parlerons de « zone de confort », « zone de contrôle » et « zone de panique » :

    • La zone de confort: on pratique sans contrainte, sans enjeu particulier (loisir) et donc sans véritable stress. Ce n’est pas une zone favorable à la performance. Pour cela, il faut passer en zone de contrôle.
    • La zone de contrôle: on vise la performance en mobilisant ses ressources du mieux possible. Cette zone contient l’aspect motivateur et émulateur de la compétition. Au bout de celle-ci, se trouve « LA Zone » ou le flow : l’état de surpassement. Cette zone de contrôle est dépendante des modulateurs de la réponse au stress que nous détaillerons par la suite. Etre performant = Rester dans cette zone.
    • La zone de panique : le stress prend le dessus, agit négativement sur le corps. Il entraîne chute du niveau sportif et perte de lucidité. A l’extrême, cela peut atteindre « l’aspect négatif de  LA Zone ». Le sportif continue à réclamer des efforts importants à son corps dont les ressources sont proches de l’épuisement. Cela peut causer de graves blessures (phénomène de Burn-out).

    stress personnalité et mental

    Trois éléments sont les principaux modulateurs du stress :

    • Les caractéristiques personnelles (cet article 1/3)
    • La capacité à contrôler et prévoir le stress (article 2/3)
    • L’entrainement/l’expérience (article 3/3)

    Les caractéristiques personnelles : personnalité et fonctionnement de chacun :

    La personnalité :

    Un sportif qui considère « sérieusement » le stress et sa possible intensité aura tendance à avoir une réponse biologique plus faible. Il s’y sera préparé.

    A l’inverse, un sportif qui considère que le stress lié à la compétition n’existe pas, aura une réponse plus forte que la normale. Imaginez quelqu’un caché derrière une porte. Si vous savez qu’il s’y trouve, même s’il veut vous surprendre, mais vous éprouverez peu de stress. En compétition le stress est là, soit on s’y adapte soit on le subit.

    Prendre le stress à la légère est une attitude qui conduit souvent à se propulser en zone de panique involontairement. Le levier d’action est la compréhension de sa personnalité. Elle permet d’identifier les points sensibles. Ainsi nous pouvons renforcer nos forces et limiter nos faiblesses.

    La personnalité est une construction comprenant des éléments personnels, une part d’éducation, d’environnement, des principes et valeurs, l’histoire et les expériences de chacun. Cette complexité demande une certaine qualification pour en saisir tous les ressorts et aboutissants. A l’heure actuelle, c’est probablement le psychologue qui la formation théorique et pratique la plus complète à ce sujet. (Ceci ne relève pas de la préparation mentale)

    Le mode de fonctionnement personnel :

    Le « mental » de chacun fait également que le stress n’est pas vécu de la même façon. Par exemple, un sportif au tempérament « guerrier » sera moins souvent l’objet du stress négatif. A l’inverse, un sportif « frileux » face à l’enjeu, subira plus de stress en compétition.

    Il convient d’identifier les moyens que privilégie le sportif dans divers domaines comme la mémorisation, l’expression de ses émotions ou encore la gestion de l’enjeu. Pour illustrer :

    • Certains mémorisent mieux par la sensation, d’autres par les images.
    • Certains ont besoin d’être démonstratifs, d’autres se déconcentreront s’ils le sont.
    • Certains, en connaissant tous les retentissements de leurs actes s’en trouveront motivés. Pour les autres, ce sera une pression supplémentaire qui les inhibera.

    stress personnalité et mental

    L’intérêt du travail avec un psychologue :

    Le psychologue est un professionnel qualifié qui possède les connaissances indispensables à l’identification de votre mode de fonctionnement et de votre personnalité. Ceci est essentiel pour proposer un travail adapté à vos objectifs.

    La gestion des émotions, l’expression des affects, la relaxation, la préparation mentale, l’entraînement mental, la fixation d’objectifs, l’évaluation sont des outils très différents. S’ils ne sont pas utilisés à bon escient, ils sont inefficaces au meilleur des cas, contre-productifs parfois. La relaxation bénéfique pour beaucoup, en rendra d’autres totalement incapable de se battre, et ce n’est pas toujours ceux que l’on pourrait croire au premier regard.

    Le psychologue intervient donc de façon judicieuse dans l’accompagnement des sportifs amateurs et professionnels dans le cadre d’un bilan global permettant de gagner un temps précieux. Son intervention peut conduire à un travail plus approfondi en fonction de ses spécialités. Sinon, il orientera sur d’autres professionnels de la performance qui correspondront mieux à la recherche du sportif.

    Bien entendu, des bilans sont proposés par d’autres professionnels. Cependant, ceux-ci sont rarement formés à la psychologie, aux types de personnalités, aux fonctionnements mentaux, ou encore à la façon de mener un entretien individuel. Hormis les psychologues et les médecins, ces professionnels ne sont pas soumis au secret professionnel. Ce dernier s’avère pourtant central dans de nombreuses situations. Mon propos concerne autant les compétiteurs amateurs que professionnels.

    Mathieu CHARON

  • Le stress en compétition

    L’objectif de cet article est de comprendre le stress pour le remettre à sa juste place.

    Il existe deux réactions face à un événement stressant :

    • la fuite (réaction de flight)
    • l’affrontement (réaction de fight)

    N’importe quelle situation provoque un stress. L’utilisation de ce mot n’a, en général, que peu de sens. « Je suis stressé » = évidence. Mais en général nous entendons par là : « je suis TROP stressé ». Ce qui va nous intéresser, c’est notre façon de le percevoir et de le vivre.

    Le stress correspond à une tension issue de l’extérieur qui va perturber notre équilibre intérieur (physiologique et psychologique). Ceci nous impose de nous adapter. Tout le monde ressent le stress. C’est, en général, un très bon carburant dans la vie comme en compétition. Tant que l’intensité est « raisonnable », le stress est qualifié de « positif » ou EUSTRESS.

    Qui dit « versant positif » dit aussi « versant négatif ». Lorsque son intensité augmente, le stress va nécessiter plus d’efforts pour être canalisé. Pour reprendre un modèle de référence (le syndrome général d’adaptation ou SGA de Selye) on entre dans une phase de « RESISTANCE ».

    C’est à ce moment-là que l’on va devoir utiliser des stratégies de type « flight » ou de type « fight ». L’une ou l’autre dépendra de la personnalité de chacun et du ressenti du moment. Face à une situation incontrôlable, je fuis ; face une situation contrôlable, je fais face.

    stress en compétition Concrètement :

    1. L’eustress ou stress positif:

    On parle quasi toujours du stress lorsque ça ne va pas. Parlons un peu des bons moments ! Le stress nous pousse à l’action, bien entendu si son intensité n’est pas trop grande. Cette énergie est une source puissante et indispensable de la motivation.

    Pourquoi tous les joueurs ou presque préfèrent aller en match plutôt que s’entraîner sérieusement à votre avis ?

    C’est parce qu’il y a le stress en compétition, il stimule, embrase le sport. Il rend les choses dignes d’intérêts, passionnantes. Malgré la déception parfois, les compétiteurs y reviennent encore et encore…

    C’est une formidable source de progrès. Le stress positif est l’élément clef de la motivation. Il permet de connaitre son propre fonctionnement et de repousser sans cesse ses limites. C’est grâce au déploiement de son énergie que l’on ressent le plaisir du jeu, les sensations, la concentration…

    Pas de STRESS POSITIF = Peu de plaisir, peu de sensation

    Ce n’est pas seulement en cas de stress « négatif » que l’on remarque cela. Parfois, il faut provoquer le stress pour, en quelque sorte, remettre du gaz dans la machine.

    En effet, lorsqu’on fait une compétition juste après une sieste… en général… cela ne donne pas grand-chose… il y a besoin d’un booster. C’est le rôle du stress positif.

    stress en compétition

    1. Le stress négatif – hyperstress :

    C’est lui qui pose le plus de problèmes. La tension est telle qu’il faut agir pour la faire baisser. Les deux façons de faire sont :

    • Le repli sur soi ou la fuite : on cherche à s’éloigner réellement ou mentalement de ce qui nous stresse : souvenons-nous de ces moments où l’on regarde autour du court au moment des balles de set par exemple… l’extérieur est tentant car moins stressant.

    D’une autre façon, le repli consiste à imaginer, à générer des pensées sans rapport avec notre situation objective mais plus agréables et sécurisantes. C’est la stratégie la plus utilisée par les enfants.

    Par cette réaction, on cherche à s’évader le temps que l’orage passe. Parfois, cependant, on s’évade tellement bien qu’on en oublie d’être performant.

    • On peut aussi faire-face : une situation peut être extrêmement intense, stressante. Mais, je sais que je dispose des ressources pour l’affronter efficacement, alors je fonce dans le tas. Le choix est une histoire personnelle, savoir de quoi on est capable ou pas.

    D’où, l’importance majeure, d’être en mesure de s’auto-évaluer, et d’être le plus lucide possible sur la situation.

    Observez les matchs des champions : ceux qui gèrent le mieux leur stress. Lorsqu’ils ont conscience qu’ils ne peuvent rien faire car l’adversaire est trop fort, ils commencent à renvoyer : ils exagèrent les effets, la hauteur,  et courent dans tous les sens pour « contenir » l’orage. Dès que l’adversaire abaisse son rythme, alors, changement de stratégie et ces athlètes reprennent le jeu à leur compte.

    stress en compétition

    Trop de STRESS NEGATIF = une fatigue progressive plus ou moins intense. Au tennis, le temps de jeu effectif (d’effort physique) est de moins de 12 min par heure de jeu (en enlevant les temps-morts : ramassage de balle, discussions, changements de côtés etc…). Pourtant, même les athlètes aguerris sont fatigués en fin de match ! Pour l’essentiel, il s’agit, dans ce cas précis, de tensions nerveuses ou stress négatif qui avec le temps use le corps comme le mental.

    Conclusion :

    Nous avons vu les deux aspects du stress : positifs et négatifs en constatant nos réactions normales et habituelles. Le but d’un sportif amateur comme professionnel est de conserver un maximum de stress positif et de minimiser le stress négatif.

    C’est la première application de l’entraînement mental. Une même situation peut être difficile pour un joueur, facile pour un autre selon son point de vue. La capacité à rester en stress positif est ce qui fait la différence entre les meilleurs. Pour dire les choses autrement :

    Rester ICI et MAINTENANT, dans l’intensité de l’instant présent. Ni pensée parasite, ni physique ou ni technique ; juste l’instant présent. A-t-on vraiment besoin de s’occuper d’autre chose lors d’un match ?

    Dans les articles suivants, nous aborderons comment nous répondons au stress. Nous verrons également quelques outils pratiques pour apprendre à le gérer.

    Mathieu CHARON

  • La Zone ou l’Art de l’instant présent

    Surpassement, zone, flow, nuage, sont des mots qui tentent de décrire un état d’esprit particulier durant lequel tout semble facile et la performance à portée de main. En réalité, il faudrait plutôt parler de degré de concentration, car parfois, on parle de « zone » pour un joueur est très concentré mais restant dans le même état d’esprit. Dans cet article, je parlerai de cet état mental spécifique qu’est la zone et je prendrai quelques exemples qui, selon moi, l’illustre bien.

    la zone ou l'art de l'instant présent

     

    Souvent, ce qu’on appelle « concentration » est maladroitement compris comme une sorte de sur-analyse très rapide réalisée par les joueurs. Ce qui explique les conseils fréquents du type : « concentre-toi ! », « tu fais exprès ou quoi ? », « fais attention à ceci ou cela !», « Souviens-toi, ton jeu de jambe !!! » etc…

    Si l’on regarde de plus près, il s’agit de mots ou plutôt de sport intellectualisé, mentalisé si l’on veut. Comme si l’on décrivait avec précision un super mode d’emploi et qu’on le relisait à chacune de nos frappes. C’est sûr que dit comme ça… la concentration est loin de faire rêver…

    A présent, voyons les propos de joueurs qui ont vécu la zone. Je reprends ici quelques exemples dans les ouvrages de Damien Lafont, Entrez dans la zone ; et Hubert Ripoll, le mental des champions. Vous trouverez les références dans la bibliographie du site.

     

    1.       Une citation de Billie Jean King : « C’est une combinaison parfaite d’action violente ayant lieu dans une atmosphère de totale tranquillité »

     

    2.       La dernière chose, c’est la simplicité. Après avoir épuisé toutes les difficultés, c’est la simplicité qui doit ressortir avec tout son charme, comme le dernier sceau de l’art ». C’est Frédéric Chopin… célèbre musicien… un joueur de tennis dans la zone devient un artiste…

     

    3.       « Ce qui est incroyable, c’est que dans cet état, tout est prévisible, j’anticipe toutes les trajectoires, j’ai ce sentiment de piloter au ralenti, j’arrive à lire en avance, comme si le jeu était coulé, je ne me fais jamais surprendre. » Avec Thierry Tulasne

     

    C’est en quelques sortes un paradoxe : on accomplit des actions de plus en plus performantes en ayant la sensation qu’elles sont si simples. Nous nous trouvons dans un état mental différent, dans lequel c’est l’intuition qui gère les choses, et non la volonté. Il est facile de constater que plus on cherche à contrôler de paramètres par la volonté plus on se fatigue, même s’il est possible d’atteindre un très haut niveau ainsi. La zone est au-delà de cela. Tout est simple, ici et maintenant, entièrement absorbé dans l’action de jeu.

    la zone ou l'art de l'instant présent

     

    Comme je l’ai dit, il s’agit d’un état mental particulier. Il est donc accessible à toute personne ayant un mental c’est-à-dire tout un chacun. Le niveau sportif importe peu. Bien entendu, à ce stade, le mental n’intervient pas « normalement » mais nous pouvons expérimenter quelques-uns des effets en nous concentrant, en étant toujours plus présent dans son match.

    Plus un joueur est « DEDANS », plus il a la sensation d’avoir le temps pour s’organiser et moins les circonstances extérieurs n’ont de conséquences sur le niveau de jeu qui devient alors plus constant. Dans  l’ensemble, un sportif « DANS » son match sera également moins sujet à certains troubles physiques comme les crampes et récupérera plus vite. Et, le plus important à mes yeux, il éprouvera de plus en plus de sensations et de plaisir malgré l’effort.

    Sur le plan de l’entraînement, c’est un aspect très intéressant, car, si un sportif est de plus en plus concentré, il s’entraîne de plus en plus efficacement. Il gagne en intensité, peut travailler plus dur sans que cela soit ressenti comme un effort titanesque.

    Je pense pouvoir affirmer aujourd’hui que les sportifs qui bénéficient de la zone, y parviennent de deux principales manières.

    1.       Par « hasard », c’est-à-dire sans entraînement spécifique. C’est à mon sens ce qui s’est passé lors de l’épopée opposant Nicolas Mahut à John Isner, plus précisément en fin de cinquième set. L’intensité de l’événement, l’ambiance, la fatigue insoutenable les ont presque naturellement conduit tous les deux vers la zone.

     

    2.       La seconde possibilité est par l’entraînement en particulier de la concentration. C’est le travail mené aujourd’hui par tous les meilleurs joueurs actuels. Chacun avec leurs propres façons de faire.

     

    la zone ou l'art de l'instant présent

    Conclusion

    La zone est un état mental différent, en quelque sorte au-delà de la concentration. Certains effets ressentis sont assez similaires avec le fait d’être très concentré, bien entendu, cela reste moins intense que dans la zone.

    De nombreux termes sont utilisés pour désigner l’état d’esprit ou le processus pour y accéder : les plus courant sont la zone, le flow, la fluidité ou encore le surpassement. Il y a bien sûr quelques petites différences que l’on peut faire mais c’est assez maladroit car, c’est un phénomène qui se vit plus qu’il ne s’explique. Il y a une telle augmentation des sensations, souvent même modification des perceptions habituelles, que les mots sont un peu faibles pour décrire un tel tableau.

    De nos jours, avec l’accentuation de l’entraînement physique, le perfectionnement technologique du matériel… je crois que ce qui fera la différence sera la capacité au surpassement, encore plus qu’avant. Même un joueur comme Nadal qui a tendance à jouer tout en contrôle et maîtrise est conduit à lâcher-prise pour parvenir à un tel niveau d’excellence. Un Djokovic a dû se rapprocher de ces états d’esprit pour passer le cap qui l’a conduit à son actuelle place de numéro 1 mondial. A l’inverse c’est sans doute ce petit truc en plus qui manque à des Murray, Ferrer ou Tsonga pour s’élever plus régulièrement à ces niveaux de jeu.

    Mathieu CHARON